Des machines à voter sur une moto

Ce mercredi 20 décembre, la République démocratique du Congo (RDC), vient de connaitre ses élections les plus chaotiques, alors que le pays en est arrivé à sa quatrième expérience en la matière.

Avec une logistique tâtonnante, et une impréparation qui faisait du reste craindre un report, la CENI a tout de même organisé ce qui apparait au yeux de tous comme un échec programme.

Si dans les bureaux de vote du centre de Kinshasa, la capitale, les choses ont semblé se faire correctement, en provinces, les électeurs ont sué sang et eau pour voter.

Le ton a été donné déjà à Mbandaka, dans la province de l’Equateur, où les témoins des partis politiques ont déploré les difficulté à accéder dans les bureaux de vote.

Et pourtant, le vote a commencé depuis 7 heures du matin dans les centres de Bakusu, du lycée Esengo et de l’Edap dans le chef-lieu de la province de l’Equateur.

Pas un fort engouement. Les témoins de certains partis politiques ont déploré de na pas avoir pu accéder aux bureaux de vote, visiblement à cause de leur effectif jugé élevé par les responsables de la CENI sur place.

Bien plus, beaucoup d’électeurs n’ont pu retrouver leurs noms sur les listes de vote probablement par omission, selon les explications des responsables de la centrale électorale à Mbandaka.

Un centre de vote à Lubumbashi (Haut-Katanga)

À Matadi, des témoins des candidats obligés de rester dehors faute de places dans les bureaux de vote

A Matadi au centre de vote de l’Institut Mabeki dans la commune de Matadi, les électeurs sont arrivés dès l’aube. Certains d’entre cherchent là où leurs noms sont affichés.

Les agents de la Ceni, les observateurs, les témoins ainsi qur les journalistes sont présents. Il est 6h, le vote n’a pas encore commencé. Cependant, au bureau de vote de L’EP Kiabilua dans la commune de Mvuzi, forte mobilisation des électeurs pour remplir leur devoir civique, les agents de la CENI déployés dans 2 bureaux, sont absent au bureau et les électeurs attendent, la CENI dit trouver une solution pour pallier cette situation

Par ailleurs au bureau de vote de l’EP Ntuadisi dans la commune de Mvuzi, le vote a commencé à 6h30, en présence des observateurs, témoins et journalistes. Un constat fait le président du bureau de vote n’a pas compté les bulletins mis à la disposition de ce bureau. Chose que les observateurs et les témoins ont condamnés. Mais aussi, l’accès limité des témoins des candidats dans les bureaux de vote faute d’espace, la plupart d’entre eux regrettent cette situation. Des électeurs font la ronde des bureaux à la recherche de leurs noms pour accomplir leurs devoirs civique.

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Bandundu : accusé de tentative de fraude, un candidat député national arrêté puis libéré

Un candidat député national sur la liste de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) arrêté par la police à 4 heures vient d’être libéré. Richard Kompay était accusé par la population de vouloir tenter d’orchestrer la fraude au centre de vote Bosembo où il a été aperçu dans les périmètres la nuit. Des personnes qui ont appelé la police ont fait savoir qu’ils seraient porteurs des bulletins de vote.

Arrêté et auditionné à la police, le suspect a été libéré. La police dit n’avoir trouvé aucune preuve attestant la tentative de fraude électorale.

Le candidat incriminé indique qu’il faisait la ronde des centres afin d’organiser le déploiement de ses témoins. Pour lui, il n’a pas été arrêté, mais plutôt protéger par la police face à la vindicte populaire.

« Je n’ai jamais été arrêté. J’ai été protégé par la police parce qu’il y a des voyous qui voulaient s’en prendre à moi. Ils ont troué les pneus du véhicule, j’étais passé pour aller voir comment déployer mes témoins. C’était à 3 heures qu’on avait commencé parce que Bandundu est grand. La police a vérifié dans mon véhicule, il n’y avait rien. Il y a des déclarations sur PV, il n’y avait rien. Il n’y avait que mes habits », a déclaré Richard Kompay.

Cette arrestation a suscité de l’émoi dans la ville de Bandundu. Le chef-lieu du Kwilu doit élire, outre la présidentielle, deux députés nationaux, trois provinciaux, et 21 conseillers communaux.

Vote émaillé d’incidents et fraudes au Kasaï central

La situation était très tendue au Kasai central, où une machine de la CENI a été trouvée dans une résidence privée d’une candidate députée nationale dénommée Denise Mukendi Duchaussoy.

C’est un autre candidat député national de l’UDPS, Christian Mukendi, alerté par la rumeur véhiculée par la population, qui a appris qu’une machine était dans cette résidence avec une foule immense qui était en train de voter. Alors qu’il essayait de comprendre de quoi il retournait, lui et son équipe ont été attaqués par la « milice » de Denise Mukendi Duchaussoy. Pendant les échauffourées, Denise Mukendi aurait emporté ladite machine à voter dans un véhicule, vers une destination inconnue.

Candidate députée nationale de l’UDPS, Denise Mukendi Duchaussoy avait une machine à votre chez elle

Pendant ce temps à Bwenamuntu, on apprend que certains électeurs qui voulaient voter le candidat n°20 voyaient apparaitre le n° 3. Les électeurs fâchés ont détruit la machine et ravagé le bureau de vote. Cette information a été démentie aussitôt par le président du bureau de vote de Bwenamuntu, qui a déclaré que la machine affichait bel et bien l’image du candidat n° 20 Félix Tshisekedi et non le n°3 Moise Katumbi.

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Il a précisé que la dite machine était tombée en panne durant le processus de votée et devait être ramené à la centrale locale de la CENI, ce qui n’a pas plu à la population, qui a tout de suite pensé qu’il s’agissait d’une tentative de fraude et s’en est prise au technicien qui voulait aller faire réparer la machine. Le pauvre a été passé à tabac, tout comme les éléments de la police commis à la sécurité du bureau de vote, dont l’un a été blessé.

A Tshikaji, le secrétaire exécutif de la CENI a été attaqué, son véhicule saccagé. Par contre, à Kananga, le vote a commencé en retard, et jusqu’à 16 heures locales certains bureaux de vote n’avaient toujours pas de matériel de vote.

Réactions des candidats à la présidentielle

S’il y a des bureaux où les gens ne votent pas, nous n’accepterons pas ces élections (Martin Fayulu)

L’opposant Martin Fayulu a voté ce matin dans le bureau de vote situé au centre de l’Athénée de la Gombe, à Kinshasa. Au sortir du bureau de vote, il a déclaré:

Martin Fayulu a aussi voté

« Nous exigeons que les gens votent dans tous ces bureaux de vote. S’il y a des bureaux où les gens ne votent pas, nous n’accepterons pas ces élections. Je serai haut devant la contestation. La vérité des urnes doit prévaloir. Je suis et je resterai l’homme de la vérité des urnes. C’est un chaos total. Il n’y a pas d’organisation. Est-ce que tout ce monde ici présent peut voter jusqu’à 18H ? Il y a insuffisance des machines à Kinshasa et à l’intérieur du pays. C’est un chaos total planifié par monsieur Kadima », a déclaré Martin Fayulu à la presse, au sortir du bureau de vote.

Moïse Katumbi dénonce les failles dans l’organisation de scrutins après avoir voté à Lubumbashi

Moïse Katumbi de son côté a voté en fin d’avant-midi à Lubumbashi, dans la commune de la Ruashi. Il a appelé la population à rester dans les différents bureaux pour sécuriser leurs voix.

Moise Katumbi a voté à Lubumbashi

« Je vais demander à la population de rester chacun dans son bureau de vote parce qu’on doit surveiller les résultats de chaque bureau de vote, et on doit afficher les résultats également » dit-il devant plusieurs centaines des personnes venues l’accompagner.

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Moïse Katumbi a également dénoncé des failles qui, selon lui, entachent le déroulement de ces élections.

Denis Mukwege : « Si dans ces scrutins, il y a des irrégularités, nous n’allons pas laisser que la population soit placée dans une position où elle ne peut pas choisir ses dirigeants »

Le candidat Denis Mukwege a voté à l’athénée de la Gombe à Kinshasa. Le Prix Nobel de la paix 2018 a assuré aller jusqu’au bout de la lutte pour que le choix du peuple soit respecté et met déjà en garde contre la fraude.

« Ce processus a été émaillé de beaucoup d’irrégularités, à tel point que nous nous posons des questions sur la finalité mais pour le moment, gardons confiance et voyons ce qui va se passer. Si dans ces scrutins, il y a des irrégularités, nous n’allons pas laisser que la population soit placée dans une position où elle ne peut pas choisir ses dirigeants », a déclaré le docteur Mukwege.

Le Cardinal Ambongo déplore le dysfonctionnement de certains dispositifs électroniques de vote

L’archevêque métropolitain de Kinshasa, Fridolin Ambongo a voté au centre situé au collège Saint Raphaël dans la commune de Limete. Après cet exercice, il dit avoir constaté l’affluence des électeurs qui, selon lui, exprime l’envie de participer aux élections pour voter ses dirigeants.

Le Cardinal Fridolin Ambongo a voté à Kinshasa

« Très heureux de voir que le peuple congolais veut aller aux élections. Vous voyez la masse qui est là, tout le monde veut exprimer sa préférence pour ses dirigeants », a dit le Cardinal Fridolin Ambongo.

Par ailleurs, le prélat catholique dit avoir constaté le dysfonctionnement des plusieurs dispositifs électroniques de vote.

« Je constate seulement que sur 11 bureaux, il n’y a que 4 qui fonctionnent jusque-là, les autres ont des problèmes de machines, de batteries. Il faudra que les solutions soient trouvées rapidement, sinon les élections vont s’étendre sur plusieurs jours », a-t-il indiqué car dit-il, « Le souhait est que tout citoyen congolais qui est en droit de voter vienne exprimer sa préférence ».

Notons que les résultats provisoires de ce vote sont attendus le 31 décembre, d’après le calendrier de la CENI. Lire aussi : Kinshasa : des électeurs forcent les portes des centres de vote