Matata Ponyo

L’ancien Premier ministre congolais Augustin Matata Ponyo, a regagné Kinshasa ce dimanche 09 mai, en provenance de la Guinée-Conakry où il se trouvait en séjour de travail.

Matata Ponyo, est sans doute le Premier ministre (2011-2015) le plus emblématique de la 3ème République, depuis la réinstauration de la démocratie en 2006. C’est à lui que le pays doit l’effacement à près de 80% de sa dette extérieure, la stabilité de la monnaie nationale, la bancarisation des salaires des fonctionnaires et agents de l’Etat, ainsi que la stabilisation du cadre macroéconomique. C’est aussi à lui que les congolais doivent la résurrection de la Compagnie aérienne nationale Congo Airways, la Société des Transports urbains Transco, la construction et la réhabilitation des hôpitaux et des écoles, et surtout, l’entrée en vigueur du Code minier révisé.

Congo Airways vol inaugural
Congo Airways, Vol inaugural

Bukanga-Lonzo, un procès d’état?

A Matata Ponyo, on doit reconnaître aussi le fiasco du plus grand projet agro-industriel, celui de Bukanga-Lonzo, qui lui vaut aujourd’hui les foudres du nouveau régime en place à Kinshasa. Lire aussi: Bukanga-Lonzo : Mis sur la sellette par l’IGF, Matata Ponyo répond et menace !

Débarqué des affaires publiques depuis 2015, Augustin Matata Ponyo, est aujourd’hui mécène, à la tête de la Fondation qui porte son nom, Consultant à l’international, professeur d’université, dont une, l’université Mapon de Kindu est le fruit de son ingéniosité, et pour couronner le tout, Conseiller Spécial en matière de gouvernance d’un Chef d’Etat africain.  Il y a quelques mois, il annonçait avec surprise, son départ du FCC, sa famille politique, et du PPRD, son parti, qu’il ne fréquentait pratiquement plus. Lire aussi: RDC : Matata Ponyo démissionne du PPRD et du FCC

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Un départ perçu par les observateurs comme une tentative d’émancipation vis-à-vis d’une formation politique d’où sa présence était tout juste tolérée, grâce notamment au soutien dont il bénéficiait auprès de l’ancien Président Joseph Kabila.

Le mal-aimé

Dès l’entrée en fonction du nouveau régime de Félix Tshisekedi, Matata Ponyo a été pris en grippe par les tenants du nouveau pouvoir, qui l’accusaient à maintes reprises des pires turpitudes durant les cinq années de son mandat.

Aujourd’hui, le Procureur près la Cour de Cassation, a écrit à la Chambre haute du Parlement, pour demander la levée de ses immunités, suite aux conclusions d’une enquête de l’Inspection générale des finances (IGF), qui le pointe du doigt, comme « auteur intellectuel » du fiasco du projet Bukanga-Lonzo, une accusation à la mode dans le paysage judiciaire congolais depuis le célèbre procès de Vital Kamerhe, peut-être pour compenser l’incapacité du ministère public à réunir des preuves formelles. Un peu comme à l’image de la chèvre de Monsieur Séguin.

Bukangalonzo
Bukanga-Lonzo

Avoir le courage de braver la justice…

Mais l’intéressé clame son innocence dans cette affaire. De Conakry où il se trouvait, il avait déjà annoncé sa volonté de revenir prouver son innocence, et avait aussi fait part de ses sentiments vis-à-vis d’une justice « instrumentalisée », selon son entendement. Et dimanche à son retour dans la capitale, il a déclaré dans un tweet qui a fait le tour sur la toile que « je viens d’arriver à Kinshasa pour répondre à la justice…par amour à la Rdc, certains d’entre-nous doivent avoir le courage de braver l’injustice. Les jeunes surtout, en ont besoin ». Lire aussi: Matata Ponyo se taille une nouvelle robe en Guinée-Conakry

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Quel que soit le scénario futur de cette saga judiciaire qui s’annonce, la plupart des observateurs à Kinshasa reconnaissent derrière ces péripéties, l’amorce d’un procès politique qui ne dit pas son nom, à l’instar du procès Vital Kamerhe.

Dans le camp resté fidèle à Joseph Kabila, Matata Ponyo, bien qu’éloigné désormais de la politique active, semble avoir pris une envergure de futur présidentiable, du fait de ses mérites qui ont largement dépassé les frontières nationales, et cela ne devrait pas réjouir certains dans la sphère politique nationale, surtout pas au sein du régime actuel, qui semble avoir difficile à faire ses marques. Un ancien élu du Maniema, l’ancien Sénateur Delphin Kapaya Ohelo, résume ainsi la situation : « la dimension présidentielle de Matata est à la base du complot pour le mettre hors d’état de nuire. L’exclusion ne paie pas à tous les coups ».