La République démocratique du Congo totalise 60 ans depuis qu’elle a accédé à la souveraineté nationale et internationale. Malgré les infrastructures trébuchantes, la musique congolaise moderne qui entraîne derrière elle plusieurs générations n’est pas passée inaperçue à travers le monde durant six décennies.
Elle a réussi à tailler son chemin dans le roc jusqu’à s’imposer dans des continents et pays lointains comme l’Asie, les Antilles. L’Afrique et l’Europe étant conquises, elle ne cesse sa progression vers le continent américain.

60 ans de musique, 720 mois de succès et de conquêtes à travers le monde, la musique congolaise avec sa rumba, une danse nationale qui a sévi le globe jusqu’à devenir une référence artistique où une identité musicale pour le pays de Kallé Jeef, Grand Maître Franco, Tabu Ley, Papa Wemba, Pépé Kallé, Koffi Lomide, Nyoka Mongo, Bozi Boziana, Kester Emeneya, JB Mpiana, Werrason, Fally Ipupa …, a souffert des sérieux maux qui ont favorisé l’exil d’un bon nombre d’artistes musiciens à l’étranger par manque d’encadrement de l’État congolais.
Fortune artistique perdue au bénéfice des profits illicites où supplémentaires
La musique congolaise aurait perdu un peu de sa force, de sa considération, de sa fortune artistique et de son identité à cause de la situation que le pays traverse, sous les 4 régimes précédents caractérisée par manque d’ un bon studio d’enregistrement, des matériels de musique sophistiqués, d’usines de fabrication de disque, bande cassette, cd, vidéos : dvd et vcd. Et pourtant nous possédons des talentueux disciples d’Orphée.

Raison pour laquelle, les uns sont allés s’installer en Europe, en Afrique, en Asie ou encore aux États-Unis d’Amérique, uniquement pour protéger leur carrière musicale sur le plan international. Car, de là, ils ont une sécurité sociale, une assurance vieillesse, une retraite professionnelle assurée par des sociétés des droits d’auteur et droits voisins. C’est tout ce qui a manqué chez nous durant les 60 ans de l’indépendance de la RDC. A ce sujet, nous pouvons prendre l’exemple de Rigo Star, Roxy Tshimpaka, JP Buse, Jimmy Yaba, Safro Manzangi, Nguma Lokito, Lita Bembo, Awilo Longomba, Lassa Carlitho, Djuna Djanana et sa progéniture Dadju et Gims, Djuna Mumbafu, Mukangi Déesse, Bethy Bis, Scola Miel, Baniele, Faila, Lidjo Kwempa, Stino Muni, Papy Tex, Boeing 737 et tant d’autres. Tabu Ley et Papa Wemba, de leur vivant, n’ont pas échappé à la règle.

Bien que relégués au second plan par une politique culturelle défavorable, les musiciens congolais ont mené chacun une vie très agitée qui a permis aux uns d’avoir des profits illicites où supplémentaires.
De 1960 à 1991, l’artiste congolais était devenu un homme qui hésite entre deux générations sans pouvoir se décider pour l’un ou l’autre.
Infrastructures aux abonnés absents
Le manque d’infrastructures adéquates à contrefait l’effort de certains artistes musiciens qui ne cessaient de sacrifier stupidement l’avenir au présent par la piraterie de leurs œuvres par les éditeurs, les disquaires, les producteurs et par eux-mêmes les artistes. La même situation à envoyé l’artiste à avoir plusieurs cordes à son arc, d’où les uns se sont fait embaucher dans des différentes institutions du pays, tant officielles que privées, le cas du guitariste Matou le Vilain de l’Anti Choc de Grand Père Bozi, actuellement dans une institution internationale, pour ne citer que lui.
Tandis que les autres étaient devenus des hommes d’affaires au détriment de la carrière choisie, le cas de Julie Cuivre de l’orchestre Simba de la belle époque, dans les affaires au niveau international depuis plus de deux décennies. Parmi eux, on peut épingler aussi des retraites anticipées totalement et partiellement. D’autres encore ont choisi l’apostolat. Ils sont devenus pasteurs, évangélistes, diacres, frères et sœurs en Christ. Le cas de Mukangi Déesse actuellement aux USA et de Lapino, respectivement chanteuse et animateur de l’Anti Choc. Autant sont versés dans la musique dite chrétienne, autant sont morts.
Durant ces six décennies, les musiciens congolais ont mené une vie de désordre pour vivre dans la débauche. Malgré cela, la musique congolaise allait toujours de l’avant pour la conquête du monde, car la génération montante est comme un enfant de balle.
Ils sont partis avec leurs richesses artistiques
Cette musique qui est passée de la 1ere, présente à la table ronde de Bruxelles où les politiciens congolais étaient partis discuter l’obtention de l’indépendance du Congo à la 2eme génération est arrivée, de fil en aiguille, à engendrer une génération en une autre, d’où avec la mort de Vicky Longomba (1987), suivi de la série noire de 1989 a 1990. Pendant cette époque que l’on a enregistré la mort de Grand Maître Franco, Mpongo Love, Empompo Loway, les frères Soki, Isac Musekiwa, Monza1er, Vadio Mambenga et autres, la musique congolaise était presqu’en ballotage.

Après ces morts en cascade, on a senti où le bas blesse, les Kallé Jeff, Grand Maitre Franco, Nico Kasanda, Empompo… sont partis avec toutes leurs richesses artistiques parce que la politique culturelle est par terre. On espérait qu’avec la 4eme République que l’on pouvait profiter de la sagesse de ceux qui sont et étaient encore vivants pour servir ceux qui vont venir demain. Mais le plus étonnant, officiellement, les vieux n’ont s’y attelé par manque de moyens, d’une bonne politique et surtout d’un lien et lieu de rapprochement entre le pouvoir et les artistes et entre les artistes eux-mêmes.
Et quand la politique s’en mêle…
Les artistes ont été utilisés abusivement, moyennant quelques coupures de banque pour besoin de campagne où propagande politique à déchirer les oreilles. Si la musique congolaise a conquis le monde, malgré l’absence de l’encadrement de la part du gouvernement et le manque de sponsors digne de nom, c’est tout simplement parce que les musiciens eux-mêmes étaient pourvus des moyens de défense qu’ils ont sus en user, en insistant vivement sur les points sensibles qui sont les productions discographiques et scéniques, l’animation et l’insertion du folk, la chorégraphie et des tournées promotionnelles à travers le monde.

Durant 60 ans, la musique congolaise s’est conduite entre deux parties de façon à ne blesser ni l’un ni l’autre. Il s’agit du public et de l’artiste lui-même qui a travaillé en collaboration surtout que le public congolais aime la bonne musique.
Ainsi, la musique congolaise de 1960 a 1991 se répartit en trois périodes distinctes : de 1960 a 1970, succès sans stabilité sociale ; de 1970 à 1980, nouvelle génération ; de 1980 a 1991, la conquête du monde.
Pour la période du succès sans stabilité sociale, nous tournerons à l’école African Jazz de Kabasele Jeef et de l’Ok Jazz de Grand Maître Franco qui, après les années 1960, tous les musiciens sortis de ces deux écoles auraient connu un succès foudroyant qui a donné le ton, le vrai ton de démarrage définitif jusqu’à asseoir la bonne réputation de la musique congolaise. Un succès qui a laissé, jusqu’aujourd’hui, la partie de ces musiciens congolais pionniers plus pauvre sur le plan social que le succès. Et, c’est la rumba qui a dominé.
Ouverture et liberté artistiques
Avec l’intervention de la nouvelle génération de 1970 a 1980, le phénomène des orchestres des jeunes, en occurrence Thu Zaina, Zaiko Langa Langa, Isifi, Yoka Lokole, Viva la Musica, Kiam, Simba, etc., est la période où on a vu naître de danses de tout genre. Et la musique zaïroise, actuellement congolaise, a franchi les frontières nationales sans moindre contestation à travers le monde à cause du crédit de son rythme qui se métamorphosait à chaque période qu’elle introduisait une nouvelle note tirée du folklore.

De 1980 à 1991, elle s’est engagée à la conquête du monde et partout, elle entraîne des remous, d’où la musique a réussi à asseoir sa réputation internationale qui bouscule l’histoire de la musique dans le monde. Le mérite de Pépé Kallé et son groupe Empire Bakuba, Abeti Masikini, Papa Wemba, Kanda Bongo Man, Rey Rema, pour ne citer que ceux-là, le témoignage. En cette même décennie, le Général Defao Matumona ayant trois cordes à son arc : à la fois chanteur, auteur-compositeur et fin danseur, trois qualités qui font de lui un puissant artiste avec les atouts d’une grande vedette, créa l’orchestre Big Stars. A ces côtés, Djo Poster Mumbata, Fataki et les autres. Def est pourvu de moyens des défenses et sait en user. Malgré son exil musical sous le régime passé et de retour à Kinshasa, il continue avec son Big Stars. On compte aussi Basilic Loningisa de Bimi Ombale, Thu Furahi Musica de Werthos, Swede Swede de Boketsu 1er, avec tant d’autres.
Emancipation des femmes chanteuses

Donc, de 1960 à 1991, la musique congolaise à connu l’émancipation avec le surabondance des chanteuses qui ont fait la pluie et le beau temps au niveau national qu’international, notamment Lucie Eyenga, Etisomba Lokinji, Abeti Masikini, Mpongo Love, Mbilia Bel, Tshala Muana, Kola La Sommité, Déesse Mukangi, Baniele, Faila, Sarah, Jolie Detta, Beyou Ciel, Bethy Bis, Schola Miel et tant d’autres. Tabu Ley et Grand Père Bozi Boziana en sont deux têtes de proue qui ont réussi à encadrer plus des chanteuses possibles car, les autres n’y parvenaient pas.
De 1991 à 1910, la nouvelle génération composée de Wenge Musica Bon Chic Bon Genre comme meneur de cette nouvelle vague musicale, Lokole Ensuite de Jules Kwata, Eden Musica de Lingwala, Anti Volcan, Wawa Star de Chéri Bo, Stunning Mangenda de Shaka Zulu et tant d’autres.

C’est aussi la période de vache grasse pour les jeunes de Wenge Musica qui a conquis le pays, l’Afrique et l’Europe. Au cours de cette conquête, leur succès était accompagné d’une forte stabilité sociale et c’était le début de la concurrence entre eux. Celle-ci les conduisait à la scission en deux groupes : Wenge BCBG de JB Mpiana et Wenge Musica de Ngiama Werrason qui connaîtra le départ d’Adolphe Dominguez pour la création de Wenge Tonya Tonya. Ces derniers fouillaient l’Europe à la recherche de voitures et jeep de bonne qualité pour impressionner leurs fans et prenaient en location de villas pour défier ministres, PDG des entreprises publiques et privées ainsi que les aînés dans la carrière.
Des mégas-concerts
Ils ont initié de concerts au stade des Martyrs où plus de 80 000 spectateurs se rendaient pour les soutenir. JB Mpiana et Ngiama Werrason ayant réussi à remplir ce grand stade, l’un des aînés, Koffi Olomide, les a emboîté le pas.
De 2010 à 2020, est la génération dite Fally Ipupa. De son départ du Quartier Latin de Koffi Olomide par la sortie de son premier, la petite star de la musique congolaise carbure au niveau international et trône au niveau national. Derrière lui, il y a Ferre Goma, Fabrigas, Héritier Watanabe, Kabose, Robino Mundibu, Innocent Balume de Goma et beaucoup d’autres qui se battent comme de diables dans les bénitiers. La RDC étant une pépinière artistique, un nouveau-né vient de casser la baraque, en la personne de « Bus na filet ». Sa toute première œuvre met déjà les mélomanes locaux d’accord.
Et voici Internet…
L’Internet ayant pris les devants, la musique congolaise à ouvert ses vannes artistiques à toutes les générations confondues. Les supports discographiques ont disparu. Les supports audio cassette et disque vinyle sont devenus rares sur le marché et candidats à la disparition pour laisser la place au cd, dvd et lcd qui, à leur tour, cèdent sous la pression de l’électronique. Aujourd’hui, YouTube contrôle la situation et les réseaux sociaux aidant, les mélomanes déboursent moins pour avoir une nouveauté. Il suffit d’un petit mouvement du doit, tout est à sa portée. Mais, que gagne l’artiste congolais ? Rien du tout !

De la Soneca à la Socoda, les artistes se disputent la gestion et le ministère de la Culture et des Arts se mêle pour récupérer sa part alors qu’étant une coopérative, l’État congolais qui devait soutenir les artistes devait tout simplement les encadrer, semble se mêler à son tour, à travers ceux qui sont nommés pour exercer leur mandat politique. Ces désordres n’a pas permis, pendant les six décennies, aux auteurs compositeurs, interprètes et éditeurs de plusieurs générations démontrées ci-haut de bénéficier de fruits de leu travail.
Donc, l’État congolais doit revoir sa politique culturelle, si elle existe, pour donner à l’or noir congolais sa juste valeur, afin de changer le comportement de l’artiste congolais qui préfère lancer de tonnes de “mabanga” dans ses chansons et lors de son passage à la télévision pour sa survie.
Dossier réalisé par Gel Boumbe