Vital Kamerhe

C’est donc lundi 11 mai, que Vital Kamerhe, directeur de cabinet du président Félix Tshisekedi, poursuivit pour détournement des deniers publics alloués au programme des 100 jours du chef de l’Etat sera devant ses juges, pour répondre des faits qui sont mis à sa charge.

Celui que ses partisans qualifient de « pacificateur » comparaitra lundi 11 mai, dans une audience publique avec Jammal Samih, le sujet libanais patron de deux sociétés commerciales et Jeannot Muhima, chargé du service Import – Export de la Présidence de la République. L’audience se passera en chambre foraine devant le Tribunal de grande instance de la Gombe à la prison centrale de Makala. L’État congolais y sera représenté comme partie civile par ses avocats. 

Un procès à très forte audience

L’affaire avait fait grand bruit, lorsque l’invitation lui avait été adressée par le procureur général Kisula, et depuis le pays tout entier est tenu en haleine. Vital Kamerhe à Makala, qu’adviendra-t-il ?

Il s’agit ni plus ni moins de détournement des deniers publics, corruption et blanchiment des capitaux, parmi les infractions mises à charge de ces personnalités.

Ainsi donc, Vital Kamerhe et Jammal Samih sont prévenus de détournement de la somme de plus de 48 millions de dollars sortie du trésor public et remise à la société du Libanais, Samibo Sarl pour l’achat et l’érection de 1500 maisons préfabriquées dans le cadre du projet des logements sociaux pour 5 provinces de la Rdc. Projet inscrit au programme des 100 jours initié par le président de la République.

Il leur est également reproché en solidarité, le détournement de plus de 2 millions de dollars remis à une autre société de Jammal, Husmal Sarl, pour l’achat et l’érection de 3 mille maisons préfabriquées pour les policiers et militaires de la ville de Kinshasa.

Jeannot Muhima, chargé du service import – export de la présidence de la République et Kamerhe sont solidairement prévenus de détournement de 1 millions 100 mille dollars remis à Muhima pour le dédouanement et le transport des maisons préfabriquées.

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Une autre prévention concerne l’acceptation indirecte par l’intermédiaire de la belle-fille de Kamerhe, Soraya Mpiana, de l’achat à son profit d’une concession mesurant 70 mètres sur 100 à Ngaliema, afin d’user de son influence réelle en tant que Directeur de cabinet du président de la République, pour faire gagner à Jammal, sous ses sociétés, les marchés publics en violation de la procédure d’appel d’offre et seuils fixés par la législation en matière de passation de marché par voie de gré à gré. 250 millions de dollars Us, la caution de mise en liberté provisoire qui pourrait déplumer Vital Kamerhe

Procès aux multiples enjeux

Ce procès très attendu revêt plusieurs enjeux politique, judiciaire et social et économique. En effet la tendance dès le départ a été de donner un caractère politique à cette affaire et lui ôter sa nature pénale, alors qu’il s’agit bien d’une affaire relevant du pénale, et dans laquelle à plusieurs reprises, la demande de  mise en liberté provisoire a été refusée à Vital Kamerhe, du fait de « sérieux indices de culpabilité » que les juges avaient décelés contre le Dircab.

Le directoire de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), son parti politique n’avait pas hésité à brandir des menaces et dans le Sud comme le Nord-Kivu, l’UNC a appelé à une ville morte en soutien au « fils du Kivu ». Autre pression politique, le spectre de l’implosion de la coalition CACH, après le désamour visible entre les militants de l’Udps et de l’UNC, qui aurait des conséquences même au niveau de la composition du gouvernement et de la représentation nationale, au Parlement.

Interférence du gouvernement ?

On a récemment senti la pression politique, avec l’investissement du Conseil des ministres dans la question du désengorgement des prisons. Si la chose est louable sur les plans sanitaire et social, elle parait en revanche cousue de fil blanc.

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En effet, le fait que Vital Kamerhe ait été cité dans le compte rendu du Conseil des ministres pose un problème de légitimité. Le Conseil des ministres ne devrait pas statuer sur la libération provisoire d’une personne détenue et en indiquer le motif aux Juges ou au parquet. Car l’état actuel de la procédure ne permet plus au Ministre de la justice d’exercer son influence supposée sur le Parquet ni à celui-ci d’accorder la liberté provisoire à Vital Kamerhe.

Le Parquet est déjà dessaisi en saisissant la juridiction de jugement avec prévenu en état de détention préventive, sans liberté provisoire. Il n’y a qu’une seule voie qui lui reste: solliciter la liberté provisoire devant la Chambre de la juridiction de jugement (le TGI Gombe, en l’espèce) qui connaitra de l’affaire (article 45 code de procédure pénale). Il peut aussi y renoncer, comme il aime bien surprendre.  Tout comme il a apparemment renoncé à démissionner de son poste de directeur de cabinet et pousser le président jusqu’au bout de la logique qui voudrait qu’il soit remplacé.

Le procès de la maturité du pouvoir judiciaire congolais

L’autre enjeu dans cette affaire, c’est l’indépendance du pouvoir judiciaire qui sera évalué lors de ce projet, le premier du genre au Congo, impliquant une personnalité de si haut rang. Après la velléité du gouvernement de forcer sa libération provisoire sous couvert  du Covid-19, la justice congolaise, observée comme un virus sous microscope par la population, aura fort à faire pour se montrer digne de la confiance que l’on semble lui accorder depuis les interpellations des responsables impliqués dans cette affaire.

Sur le plan économique, la passation des marchés public-privé sera peut-être mieux organisée, si le procès se passe bien, les entreprises fictives et autres impliquée dans ce vaste réseau de détournement des fonds publics et d’attribution des marchés juteux à des entreprises sans fondement légaux.

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Etat de droit ?

Sur le plan social, ce sera l’occasion pour la population d’éprouver l’indépendance de la justice et la bonne foi apparente du chef de l’Etat qui crie à qui veut l’entendre « Etat de droit », mais aussi l’occasion de se réconcilier avec les dirigeants qui donnent l’impression d’avoir tous les droits sans rien devoir à la société. Une forte peine est attendue en cas de condamnation.

A Beni, au Nrd-Kivu, ces habitants, interrogés par notre correspondant Papy Roger Aezema se sont exclamés : « Pour une personne accusée de détournement de l’argent du contribuable congolais, on ne peut pas applaudir mais il faut un grand soutien à la justice pour qu’il soit puni conformément à la loi. L’État de droit ne signifie pas applaudir pour un fautif. » … et concernant le mariage entre UDPS-UNC, « leur mariage est assis sur une mauvaise fondation. Construire en matériaux durable dans le sable, on doit s’attendre à la catastrophe ».

Opinion publique et médias mobilisés

Il est évident que l’opinion publique qui reste tout de même sceptique observera ce procès de près, d’autant qu’il sera diffusé en direct par certains médias, dont la chaîne de télévision de Vital Kamerhe, Canal futur, qui a sollicité et obtenu du pouvoir judiciaire l’autorisation de couvrir le procès, Congo Web Télévision et bien entendu la RTNC, dont le car de reportage est déjà à la prison centrale de Makala…

Comme lors de sa mise aux arrêts, infocongo.net a approché Maître Apollinaire Ngakunku, qui donne l’éclairage de ce qui va se passer au cours de la première séance du procès Vital Kamerhe et consorts…

Maître Apollinaire Ngankuku, consultant juridique infocongo.net