La corruption et le petit commerce sont des fleurons de la société congolaise car, les congolais sont habitués à ces pratiques derrière les guichets. La pratique a atteint tous les niveaux de l’administration publique. La vente des imprimés de valeur, au départ gratuite, le monnayage des petits renseignements, le déblocage d’un dossier administratif en échange d’un petit pourboire, etc… ont détruit la mentalité d’une population soumise à la misère.
La corruption est en RDC un mal profond, une énorme pieuvre qui a bien prospéré durant plus d’un demi-siècle. Les remaniements ministériels devaient avoir pour dessein d’épurer la haute administration des affairistes les plus dangereux. Bien que cela ne suffise pour guérir la plaie, on devait commencer par là.
Le congolais boucle ses fins du mois par les « à-côté »
Comment, dès lors, peut-on persuader le congolais moyen, habitué à boucler ses fins du mois pas des à-côtés pour que désormais, de se contenter de son salaire permettant de faire triompher la politique d’assainissement et la lutte contre la corruption prônées par le président de la République, Félix Tshisekedi ? Comment si ce n’est pas une refonte complète du système salarial ?
La structure actuelle des salaires est anachronique et doublée de plusieurs arriérés qui ne datent pas d’aujourd’hui. Dans certaines entreprises publiques, le personnel accuse un retard de salaire de plusieurs mois.
On peut dire que cette structure salariale date des premières années de l’indépendance et les réajustements intervenus depuis, n’ont jamais suivi la croissance démographique, ni le coût de la vie. Ce sont de ce fait, les catégories les plus basses qui payent, leur pouvoir d’achat ne permettant plus de couvrir les besoins familiaux. Chacune des catégories cherche désespérément des solutions de survie. Les petits “business”, les commerces fleurissement au coin des couloirs administratifs et des rues ; des fonctionnaires deviennent chauffeurs de taxi, taxi-bus, jardiniers, pêcheurs le matin avant d’aller au travail, le soir après avoir quitté les bureaux et les fins de semaine.
De petites gargotes ambulantes appelées dans le jargon kinois “Malewa” fleurissent à travers les installations des ministères et entreprises publiques au vu et su de l’autorité dirigeante. Dans la plupart des cas, ce sont des femmes qui détiennent ces petits commerces et surtout, elles ont de profondes affinités avec le chef.
Sans cesse, partagés entre leur travail au bureau et leurs activités secondaires, ils ont tendance à perdre la conscience professionnelle. La nécessité de joindre les deux bouts du mois et une politique salariale défectueuse sont les deux seules explications l’absentéisme fléau de l’administration.
Le congolais subit un harcèlement moral
Eu égard à ces aspects évoqués, il n’y a aucun moral qui tient dans la misère. Comme par un coup de baguette magique, la “rigueur” et “la moralisation” ne feront pas disparaître ces comportements. Des mesures concrètes doivent plutôt être prises, notamment la valorisation du pouvoir d’achat, l’augmentation conséquente des bas salaires et le plafonnement des plus élevés. Le politique congolais doit passer à la désacralisation et à la désaccoutumance de l’affairisme qui a gagné du temps dans l’administration publique et dans les entreprises.
Ce grand coup sur les revenus, réclamé par les secteurs les plus larges de l’opinion, est autant plus urgent que la rigueur en s’attaquant à l’affairisme, a perturbé, du moins pour un temps, les circuits traditionnels de la distribution. Si le barème “Mbudi” avait été mis en application, le congolais moyen de la Fonction publique aurait un tant soit peu soufflé. Il aurait mis fin ou encore réduit ses gymnastiques quotidiennes de recherche de la survie pour sa progéniture. A part la femme à travers le monde qui subit le harcèlement sexuel, le congolais subit un harcèlement moral.
Fortune bâtie sur un réseau de corruption
La stabilité économique et politique de la RDC a longtemps été fondée sur ” l’entente cordiale” des milieux d’affaires et des hautes sphères de l’administration et de la politique. Cette minorité agissante à bâti sa fortune sur tout un réseau de corruption. Mais aussi, elle a joué un rôle d’amortisseur. Elle a évité la surchauffe des tensions sociales en distribuant aux employés des services publics, des petits marchés dans l’informel. A l’instar d’une chèvre attachée, le congolais a souvent la possibilité de « brouter là où il est attaché », c’est-à-dire, de s’approvisionner sur son lieu de travail.
Pour l’heure, le nouveau pouvoir de Kinshasa doit s’activer à repenser la structure des salaires. La lutte contre la corruption prônée par le président de la République et le nécessaire changement de mentalités ne peuvent s’appuyer sur cette base économique concrète.
Ni compétence, ni méritocratie
Autre mal, ce que les intellectuels congolais ayant fini leurs études, ils sont marginalisés par le pouvoir. Seuls les membres de ceux qui sont au pouvoir sont appelés à des fonctions au sein de différents services de l’État, notamment la Présidence de la République, le gouvernement, le parlement et dans les entreprises publiques. Et là, aucun critère de méritocratie ni de compétence n’est imposé.
Pourquoi le cacher, la force des choses expédie bien les intellectuels congolais à la réalisation de basses besognes. Incidence et imperfection s’ajoutent aux maladresses graves, parce que « l’homme qu’il faut » n’occupe jamais – ou très peu – la place qu’il faut.
La magouille sévit autour des marchés, c’est pourquoi au niveau de l’Etat, la débrouillardise et la corruption vivent en harmonie avec l’usure. Depuis toujours, les agents et cadres honnêtes et compétents sont écartés des tâches politiques au bénéfice des ” béni-oui-oui”. La suite, on la connaît !
Gel Boumbe