Vingt ans après la guerre de six jours à Kisangani, Sire Joël Ngoyi lance la chanson “Jambo”

C’est ce samedi 25 juillet 2020 à 18h précises, heure locale de Kisangani, que la chanson “Jambo” de l’artiste musicien Sire Joël Ngoyi sera lancée officiellement au grand public sur la chaîne “You Tube : Sire Joël Ngoyi official TV”. Infocongo.net a  rencontré l’artiste pour lui tirer les vers du nez. Suivez l’entretien en exclusivité dans les lignes qui suivent.

Tirée de l’album “Isato” composé de plusieurs titres, la chanson “Jambo” sortira en single pour annoncer la moisson musicale de ce jeune artiste au talent à revendre.

“Jambo” est l’histoire de la guerre de six jours durant laquelle les armées de deux pays étrangers, le Rwanda et l’Ouganda, se sont affrontées dans la ville de Kisangani. Cette guerre a causé de très importantes pertes en vies humaines et de destructions massives des infrastructures de la ville, notamment routes, immeubles, écoles, marchés, usines, etc.

Infocongo.net : Pourquoi avez-vous titré votre chanson “Jambo”. A qui dites-vous bonjour dans cette chanson ?

Sire Joël Ngoyi : Je pense aux événements macabres que j’ai vécus dans ma ville. Vingt ans après, ce souvenir noir collé dans ma tête comme une sangsue sur la peau, ne cesse de me rappeler ces moments horribles de ma vie.

Le film défile encore dans mes yeux comme si l’affrontement a eu lieu hier et me rappelle à fond, des odeurs fétides des cadavres jonchés le long des routes de Kisangani. Des images aveuglantes comme celle de cet homme qui voulait traverser la rue et il a été tué. Également celle d’un enfant d’environ 8 ans qui a perdu  son œil droit et au lieu de pleurer, les vivants étaient plus acclimatés. Se rappelant encore des tirs d’obus qui déchiraient mon cœur, des soldats misanthropes parlant des langues étrangères qui faisaient irruption dans des ménages, imposant leur désir à l’impuissante population humiliée, et sans moyens de défense, m’a poussé à écrire la chanson “Jambo”.

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Sire Joel Ngoyi, artiste musicien

Infocongo.net : Si on comprend bien l’idée de l’artiste, “JAMBO ” est une chanson dans la quelle vous racontez les atrocités d’une guerre de deux armées étrangères dans la ville de Kisangani ?

SJN : Je me suis inspiré à écrire cette chanson parce que j’avais frôlé la mort durant cette hideuse guerre .C’est une façon de me libérer du traumatisme de cette affreuse guerre que j’ai vécue. Jusqu’ aujourd’hui, il y a vingt ans passés, je manque des fois le sommeil. Je frissonne, les images têtues, comme un mulet, qui ne cessent de me revenir à l’esprit. D’ailleurs, je n’ai pas pu aborder l’histoire de manière profonde et claire dans la chanson.

Infocongo.net : Il y a quelque chose qui vous a empêché d’atteindre la profondeur de votre cœur ?

SJN : C’est pour éviter de réveiller des sentiments de la population endormie. Sinon j’allais révolter les consciences  des boyomais et boyomaises qui ont vécu, comme moi, la guerre.

Infocongo.net : Vingt ans après, pourquoi y revenir. Ce n’est pas une façon de remuer le couteau dans la plaie ?

SJN : A vrai dire, c’est la pandémie de coronavirus, un événement aussi macabre, qui m’a ragaillardi à écrire des  chansons sur le social. Mais aussi, de mettre à jour certains titres qui traînaient dans mon placard. Et du coup, je me suis retrouvé avec un  nombre important de chansons qui m’ont poussé d’aller au studio.  Le message contenu dans “Jambo” et la qualité des images impeccables, ont fait de la chanson un tube parmi toutes les autres avant la sortie officielle de l’album. On l’a arrangé au style purement africain. L’exclusivité dans tout cela, la chanson bénéficie d’un son envoûtant issu de la guitare acoustique qui accompagne une voix enfantine introduisant la chanson, qui ne laisse personne indifférent.

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Que pouvons-nous retenir de sa description ?

SJN : La durée de la chanson est de deux minutes, vingt-sept secondes (2’27’’). Son clip a une durée maximale de deux minutes, quarante-sept secondes. Le single est produit sous le label de “Desaiglons production”

Infocongo.net : En écrivant la chanson,  avez-vous un objectif à atteindre ?

SJN : Le single a pour objectif  d’attirer l’attention, tant nationale qu’internationale, sur cette guerre qui est une triste réalité ignorée. Il faut que la mémoire des victimes de cette guerre, les rescapés, la ville de Kisangani et la RDC soient réhabilités dans leur droit. Le regard du monde ne soit pas seulement tourné vers le football et les chansons aux fonds creux, mais pleines d’obscénités qui ravissent les écrans de nos télés et passent en boucle tant à la radio qu’à la télévision.

Interview réalisée par Gel Boumbe