Champs de ruines et des pillages de l’Afrique médiane, victime de son espace (2.345.000 km²), de ses potentialités minières et de l’importance de sa population, la République démocratique du Congo est réduite à l’impuissance, pour longtemps encore, par la faillite de l’Etat et la débâcle économique et sociale. Le franc congolais ne cesse de s’incliner devant le dollar américain dont 1$ vaut actuellement 1.975 Fc.

Aujourd’hui, la province de l’Ituri est en proie à l’invasion des groupes armés, venus de quelques pays limitrophes, qui pullulent dans les forêts et sèment la désolation au sein de la population autochtone.
Mbororo et groupes armés, même combat
Non seulement en Ituri où l’ADF et le CODECO, un groupe armé récemment créé qui sèment la terreur, mais aussi dans le Bas-Uélé et le Haut-Uélé où LRA, SPLA, FDLR et les Mbororo ont profité, de ses frontières poreuses, pour envahir le Nord de la RDC. Ces envahisseurs tuent, violent, brûlent des maisons, abattent les éléphants et d’autres espèces rares, exploitent minerais et bois.
Dès lors, l’Eglise Catholique ne cesse de dénoncer ces troubles, position soutenue par la population, mais sans réaction de la part du gouvernement. Plusieurs rapports envoyés aux autorités hiérarchiques sur la présence manifeste de ces groupes armés et surtout des éleveurs nord-africains appelés Mbororo sont restés sans suite, affirment des Grands chefs des Groupements et chefferies ainsi que les autorités territoriales.
Ces occupants illégaux se sentent aussi en paix et affluent dans tous les sens pour envahir les terres qu’ils occupent aujourd’hui. Difficile cohabitation avec la population autochtone, leurs bêtes dévastent les champs et polluent l’eau potable des sources. Chaque semaine ne manque pas un ou deux procès sur les dégâts causés par leurs vaches sur les champs de la population. Ils parlent Arabe, Falala et Sango, langues non connues des populations locales et leurs sites sont inaccessibles aux Congolais.
On se souvient à Buye, une localité de la chefferie d’Ezo, comme les Mbororo détiennent les armes de guerre, leur Représentant, Mohamed Tchad avait semé la terreur en tuant 5 personnes et 3 armes de guerre qu’il détenait ont été saisies.
Ils reconnaissent qu’ils sont des étrangers venus chercher le pâturage de bonne qualité qui facilite la reproduction de leurs bêtes et attendent que les documents officiels leurs soient livrés afin de s’installer définitivement en RDC.
Avec un nombre difficile à évaluer, puisqu’ils continuent à venir, les autres opèrent dans la brousse à l’insu de leur représentant, Mohamed Tchad.
Réactions de la partie Congolaise et des Mbororo
Il sied de signaler ici que la perméabilité des longues frontières congolaises mal protégées, entre la République Centrafricaine et le Soudan favorise la pénétration des Mbororo en RDC. C’est la cause principale !
« Ils sont installés sans document migratoire, ni droit coutumier ; ils prétendent que les terres occupées leurs appartiennent et ne retourneront pas chez eux. Ils se permettent de taper sur les chasseurs Congolais dans la forêt », affirme un habitant de Dungu.
Ils reconnaissent leur illégalité
De leur côté, un membre de la Commission des Mbororo a précisé qu’ils ont entré par le Bas-Uélé alors District en 2002, en provenance de la République Centrafricaine par l’issue de Pasi.
« Nous n’avions pas su qui voir et nous sommes installés sans remplir les formalités d’immigration reconnues à travers les ressortissants étrangers. Nous savons que nous n’avons pas la permission de détenir les armes, mais au départ du Soudan, certains avaient des armes et en 2007, après le retour de notre représentant Mohamed Tchad de Kisangani, quelques armes lui ont été remises. Les chasseurs Congolais tuent aussi nos bêtes dans la brousse et nous sommes victimes de tracasseries policières », a-t-il déclaré on ajoutant qu’il ne connait pas le nombre exact des Mbororo sur le sol congolais, mais il reconnait au moins que le plus grand nombre se trouve dans la province du Bas-Uélé.
Les Grands chefs coutumiers accusent et décident
Le Grand Chef Dikamoke Sadi de la chefferie Malingindo, dans le Territoire de Dungu se rappelle de sa séquestration par les Mbororo en 2007. Ayant réussi de quitter son village pour Isiro, il avait rencontré les autorités pour en faire le rapport.
« La présence des Mbororo est une insécurité car, l’État ne sait pas s’assumer pour sécuriser sa population et ses frontières. Nous avons connu deux catégories de Mbororo : La première catégorie était des braconniers qui n’avaient pas des vâches, mais ils se livraient à l’abattage des éléphants et l’actuelle, se sont les éleveurs détenant aussi des armes. Bien qu’ils élèvent les vaches, ils abattent aussi les bêtes de notre faune. Dans ma chefferie dont la superficie est de 10.800 km², leur nombre est plus supérieur que ma population qui est de 15.000 habitants, alors que les Mbororo sont à 20.000 personnes. Les accepter parmi nous pour les mettre où ?
Depuis qu’ils sont là, la population autochtone n’y accède plus, on suppose que là où ils occupent deviennent des lieux où ils cachent leurs armes et minutions. Nos activités sont bloquées et nous ne vivons plus à l’aise. Nos forêts et rivières sont devenues inaccessibles et il y a flambé de prix sur le marché. Ils vendent leurs bêtes très chères, sauf celles qui sont malades et qu’ils abattent pour vendre à la population.
Ils profanent les lieux sacrés en détruisant les cimetières de nos Grands Chefs ainsi que les champs de la population.
J’ai trouvé auprès d’eux, 3 armes de marque J3
Les Mbororo ne sont pas des réfugiés, la paix règne dans leurs pays, le gouvernement congolais doit les faire sortir de notre terre, au cas contraire, qu’il nous envoie des armes pour les chasser. Si nous cherchons nous même les armes, on va nous qualifier des rebelles alors que nous voulons défendre notre terre », a tout expliqué le Grand Chef Dikamoke Sadi.
Le comité territorial de sécurité de Dungu précise que les tous premiers Mbororo étaient des braconniers qui disposaient des chevaux, des chameaux et des ânes. Ils promenaient avec de pointes d’ivoire des éléphants qu’ils abattaient au Parc, au vu et au su de tout le monde. Le colonel Malik du Régiment qui était au Parc de la Garamba avait réussi à les refouler tout en ravissant 5 ânes et 1 cheval. Ils avaient quitté le pays par les Territoires de Niangara et d’Ango.
L’actuelle catégorie des Mbororo sont des éleveurs qui sont entrés par la localité de Banda, limitrophe de la province du Bas-Uélé, située dans la chefferie de Malingindo, cela depuis 2002.
Le comité territorial de sécurité de Dungu confirme que leur présence est une insécurité parce qu’ils disposent des armes de guerre et attaquent les populations dans la forêt, les empêchant de vaquer à leurs occupations et leurs bêtes détruisent les champs et salissent les sources d’eau potable.
Le Gouvernement doit sécuriser les frontières qui sont poreuses jusqu’à ce jour
Le déploiement des éléments de la Police nationale et des FARDC dans les chefferies où sont les Mbororo, suivi de leur désarmement, recensement et enfin de leur rapatriement dans leurs pays d’origine, après une action diplomatique, serait la meilleure et definitve solution.
Le Comité ajoute aussi la présence des rebelles Ougandais de l’Armée de Résistance du Seigneur (LRA) et des Soudanais de l’Armée de Libération du Peuple Soudanais (SPLA). L’information est confirmée par la Représentation de la MONUSCO à Dungu qui reconnait avoir adressé ses rapports à sa hiérarchie au sujet de Mbororo, LRA et SPLA.
L’Eglise Catholique s’emploi dans ses œuvres traditionnelles
L’Eglise Catholique en a parlé et ne cesse de dénoncer ce grand complot ourdi dont la machine tourne au vu et au su des autorités congolaises et de la population impuissante par manque des moyens de défense.
Mgr Ayikuli Sosthène, Evêque du Diocèse de Mahagi-Nioki, Mgr Andavo, Evêque d’Isiro et Mgr Uringi Dieudonné, Evêque de Diocèse de Bunia n’ont jamais gardé silence sur la situation qui passe dans cette partie de la RDC. Mais, ils semblent prêcher, presque, dans le dessert.
Mgr Uringi Dieudonné : « Attention à la balkanisation »
Dans son homélie du dimanche de la Pentecôte, le 31 mai dernier, l’Evêque de Bunia a dénoncé ce qui se passe actuellement en Ituri

« Il y a trois problèmes qui nous préoccupent : La balkanisation du Nord-est de la RDC est en marche, si nous ne veillons pas, nous serons surpris de voir que cette partie du pays ne nous appartient plus. Deuxième chose, c’est l’opération d’occupation de terrain. C’est pourquoi, on chasse les populations autochtones, on brule leurs maisons, on les tue pour que l’espace soit vide. La troisième, c’est l’exploitation de nos ressources naturelles, ils veulent exploiter le pétrole. Nous devons être vigilants et nous mettre débout, sinon nous connaîtrons le sort du Soudan, aujourd’hui deux pays. Tout cela, avec la complicité de certains compatriotes Congolais qui sont dans le coup », a dénoncé Mgr Uringi Dieudonné, Evêque de Bunia.
Mgr Ayikuli Sosthène : « Un plan d’occupation demeure pendant »
De son côté, Mgr Ayikuli Sosthène, Evêque de Mahagi-Nioki, reconnait que l’Ituri est dans l’insécurité.

« Franchement, l’Ituri traverse une situation d’insécurité très récurrente. Un phénomène étrange. Tenez : Au début de l’année passée, c’était systématique et on s’est rendu compte à un certain moment qu’il n’y avait plus des policiers et des militaires dans leurs petits camps, restés vides. Le constat était qu’on commençait à tuer la population et à brûler leurs maisons. On n’avait pas la réponse adéquate sur la situation et sans moyen de défense, on était resté ébahi.
Une lecture de ma part était que comme on avait chassé les militaires qui protégeaient la population et leurs biens, ce qu’il y a un problème.
Dans le littoral de lac Albert, il y a le pétrole et pour bien l’exploiter librement, il faut chasser les autochtones. Deuxième chose, il y a politique d’occupation. Il semble que le projet de balkanisation demeure, donc il est encore et toujours pendant.
C’est avec souffrance au cœur que nous vivons car, les moyens d’assistance pour cette population nous manquent. Il est inadmissible que de groupes armés quittent leurs pays pour s’installer sur notre terre, et font ce qu’ils veulent. On se pose alors la question de savoir, est-ce que nous existons comme un Etat ? On nous dit ce sont des assaillants, ils habitent les endroits surplombants de montagnes. Ils commencent d’attaquer par des armes blanches et ensuite, avec des armes de guerre.
Cette fois, avec les nouveaux dirigeants, nous ne verrons plus ce qui empêchera les éléments des FARDC à faire sortir ces assaillants de notre frontière car, la situation perdure et la population est dans le sursaut de la peur. Un message d’espoir, le peuple doit travailler et en étant acteurs, chacun doit prendre ses responsabilités en mains », explicite l’Evêque de Mahagi-Nioki.
Mgr Andavo : « Nous n’allons pas faire les élections municipales avec les envahisseurs »
La province de Haut-Uélé connait une invasion étrangère avec le phénomène Mbororo. Ces éleveurs Tchadiens, Soudanais et Centrafricains occupent illégalement des dizaines de km² de terre des peuples autochtones congolais. Mgr Andavo, Evêque d’Isiro n’a cessé de dénoncer cette situation qui a pris racines, mais aucune réaction de la part des autorités politico-administratives.

Sa mission prophétique l’oblige, il revient sur la situation malheureuse que vive la population de son diocèse ecclésiastique
« Notre province est envahi des Mbororo et le phénomène s’est accentué ce dernier temps. Depuis plus d’une décennie, aucune réaction positive de la part des gouvernements, tant national que provincial. La population était prête à se prendre en charge pour éradiquer le phénomène. Le 30 juin de l’année dernière, 2019, était la date programmée par la population du Haut-Uélé pour manifester pacifiquement en se conformant aux lois de la République. Nos conseils aidant, elle a attendu la publication des gouvernements national et provincial où elle fondait son espoir », a indiqué l’Evêque d’Isiro.
La population prête à se prendre en charge
« Ayant déjà compris que les Mbororo étant des expatriés armés, capables de se défendre, la population l’a dit tout haut qu’elle va agir autrement en s’attaquant à leurs bêtes. Elle a dit qu’un pays ne peut se prétendre être en paix lorsqu’une partie est en difficulté due à l’insécurité. Les Mbororo sont en terre congolaise depuis 2002, plusieurs rapports et plaintes déposés auprès des autorités restent sans suite. Le silence coupable pousse à la théorie de balkanisation, déjà nous sommes envahis, dans certaines chefferies, ces éleveurs armés sont plus nombreux que la population locale », a dévoilé Mgr Andavo.
Au sujet des élections municipales et locales, l’Archevêque d’Isiro précise que le bout du tunnel est encore loin, malgré les signatures récoltées
« Allons-nous faire les élections municipales et locales avec tous ces envahisseurs ? Que seront alors les résultats ? Là, les peuples congolais de ces parties du pays occupées par les étrangers risquent d’être dirigés par les non autochtones. Les élections à la base, c’est-à-dire, municipales, communales et locales sont le chemin de la démocratie. Que personne ne vous trompe, sans ces élections, le bout du tunnel sera encore loin. Depuis que plus de deux millions des signatures ont été récoltées jusqu’aujourd’hui, silence radio et on commence encore à manipuler la Commission électorale nationale indépendante pour nous mettre, à la tête de cette institution d’appui à la démocratie, un pion de l’équipe sortant ayant organisé les élections de la manière que tout le monde connait la suite », a démontré l’Evêque d’Isiro.
En RDC, les Mbororo ont une page d’histoire
Pour la petite histoire, les éleveurs nord-africains, les Mbororo, sont plus spécialement Tchadiens, Centrafricains, Libyens et Soudanais. Ils furent leur première entrée en République démocratique du Congo, alors Zaïre, en 1988, par la province de l’Equateur. Ils étaient vite réprimés et chassés du pays par les Forces Armées Zaïroises (FAZ).
En décembre 2000, profitant des frontières mal protégées, ils revinrent de nouveau en RDC par la province Orientale, en traversant les rivières Mbomu et Gwane dans le territoire d’Ango dans le Bas-Uélé, en provenance de la localité centrafricaine de Mboki.

Ils atteindront ensuite les Territoires de Poko dans le Bas-Uélé et de Dungu dans le Haut-Uélé en 2002. Ils furent chassés de Poko en 2003 par les autorités de transition (Gouvernement 1+4), et retournèrent vite en 2005. A ce jour, les Mbororo sont localisés dans la province du Bas-Uélé, précisément dans le Territoire d’Ango, dans les chefferies Sasa, Ezo et Mopoy ; en Territoire de Poko, dans les chefferies Maeli et Surunga.
Envahisseurs….très envahissants!
Dans la province de Haut-Uélé, les Mbororo sont dans le Territoire de Dungu, au poste d’Etat de Doruma, précisément dans les chefferies Ndolongo et Malingindo. Ils sont aussi dans d’autres localités de ces deux provinces qui ne sont pas cités ici, à cause de leur mouvement migratoire.
Cette affaire de Mbororo a trop duré, mais la solution attendue du gouvernement n’est jusque-là prévisible. Lors de la mission d’enquête de l’Assemblée nationale en décembre 2007, dont elle a été conduite par l’honorable Idambituo, la population et les Grands chefs coutumiers souhaitaient que le gouvernement règle rapidement la question des Mbororo en les faisant rentrer dans leurs pays respectifs. Certains voulaient cependant que cela se passe dans la dignité et sans brutalité en vue d’éviter des affrontements sanglants inutiles.
A ce sujet, l’autorité provinciale de l’époque avait invité le Représentant des Mbororo, Mr Mohamed Tchad, à Kisangani et les deux parties se sont convenues de procéder au déploiement sur place et aux frontières, des éléments des forces armées congolaises (FARDC), de la Police nationale et des services spéciaux ; à l’identification et au recensement, au cantonnement et au rapatriement des Mbororo dans leurs pays d’origine en usant de la diplomatie.
Mohamed Tchad, leur Représentant, était responsabilisé pour assurer une meilleure sensibilisation de ces mesures auprès de ses compatriotes et partenaires en vue de leur matérialisation. Un document « A qui de Droit » lui était délivré, le permettant de bien accomplir sa tâche.
RDC, le paradis des Mbororo
Mais, les Mbororo souhaitaient ardemment rester au Congo en raison d’abondant pâturages, de meilleure qualité, qui favorisent la reproduction de leurs bêtes.
Aujourd’hui, la population du Nord-est de la RDC soutient que la meilleure solution est de sécurité la frontière Nord de la RDC devenue poreuse entre le Soudan et la République Centrafricaine, en installant les éléments des FARDC, de la Police nationale et des services de sécurité bien équipés, encadrés et bien payés régulièrement en vue d’éviter qu’ils ne deviennent de nouveau une source des tracasseries pour la population.
Contraindre par la négociation ou par la force, si nécessaire, les éleveurs Mbororo ainsi que les groupes armés qui occupent inopinément ce territoire, de rentrer rapidement dans leurs pays d’origine.
Cette frontière du territoire nationale congolais, inhabitée et d’une longueur de plus de 400 km, la séparant du Soudan et du Tchad, mérite bien une bonne sécurisation.
Ce n’est qu’au début de cette année que le nouveau président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo a décidé d’utiliser la force en envoyant les éléments des FARDC sur le terrain. Mais l’ennemi fait fi. Malgré cela, le souhait des Congolais est de voir cette partie de leur pays pacifiée.
Dossier réalisé par Gel Boumbe