Projet de loi Minaku : L’opération « Toyebi Ndako » fait plusieurs dégâts matériels

Ce mercredi matin, une partie de la ville de Kinshasa était en ébullition. Du boulevard Triomphal à l’avenue Nyangwe dans la commune de Lingwala en passant par le Palais du Peuple, les wewa ont fait la loi.

Les propositions de lois d’Aubin Minaku et Garry Sakata visant entre autre la possibilité pour le ministre de la Justice de prendre des mesures conservatoires à l’encontre d’un magistrat du Parquet défaillant sans définir les cas considérés comme de défaillance ; fixation des modalités pratiques des enquêtes menées par l’inspectorat judiciaire sur les magistrats ; l’intervention du ministre de la justice dans le choix et nomination de magistrats de la Cour Constitutionnelle ont paralysé une partie de la ville de Kinshasa durant deux jours, mardi 23 et mercredi 24 juin.

En effet, pour la journée du mardi 23 juin, la résidence du député national Aubin Minaku a été attaquée par un groupe de motocyclistes qui manifestaient contre ses propositions de lois sur le Parquet, déposées à l’Assemblée nationale.

C’est grâce à l’intervention de la police nationale dépêchée sur place et qui a tiré des gaz lacrymogènes pour disperser ces motards que l’immeuble et ses occupants ont été sauvés de justesse.

Les manifestants ont scandé des chansons pour avertir l’ancien speaker de la chambre basse du parlement qu’il doit retirer ce projet de loi, sinon,  il n’aura pas la vie sauve. Et selon eux, ces propositions de lois visent à restreindre le pouvoir des magistrats au profit du Ministre de la Justice.

Pour la journée de ce mardi 23 juin, on a enregistré deux blessés graves et plusieurs cas d’arrestations. L’Union pour la Démocratie et le progrès social, Udps, avait promis de mobiliser la majorité populaire contre la majorité artificielle, enfin de barrer la route à ces lois du Front Commun pour le Congo, Fcc.

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Dans sa réaction, le bureau de l’Assemblée nationale a condamné ces assauts des motocyclistes « Wewa ». Son porte-parole, Célestin Musao Kalombo, a signifié que la conférence des présidents a déploré la violence et la brutalité dont les députés ont été victimes :

Résidence Jean-Marie Kasamba , sur Kabinda Lingwala, caillassée

« Il est inadmissible que les militants d’un certain parti politique qui prône la démocratie se permettent d’empêcher les députés nationaux de travailler normalement. La population est invitée au calme parce que les lois sont votées par toutes les tendances qui prennent part. Il n’y a pas péril en la demeure ».

Le parti Envol du député national Delly Sessanga  a fait aussi une déclaration le même jour en disant « non » aux propositions de lois d’Aubin Minaku, qu’il juge « inconstitutionnelle ». Il indique que la loi Minaku consacre l’inféodation et la caporalisation de la justice.

Un mercredi noir

La journée du mercredi 24 juin a été plus sanglante que la veille au vu des dégâts enregistrés. Plusieurs propriétés de cadres du Fcc ont été attaquées ce matin, dont l’hôtel Algarve de l’ancien gouverneur de la ville de Kinshasa, André Kimbuta sur l’avenue Kabinda à côté de la Rtnc dans le quartier Beau vent, la résidence du patron de Télé 50, Jean Marie Kasanda, sur la même avenue, le flat hôtel de Ngoy Kasanji sur l’avenue Nyangwe et celui du secrétaire permanent du Pprd, Emmanuel Shadary sur l’avenue Mushi, tous dans la commune de Lingwala.

Hôtel Algarve sur av. Kabinda, saccagé

Pour cette journée, on a enregistré des femmes et jeunes filles parmi les manifestants qui sont venus dire non aux propositions de lois d’Aubin Minaku et Sakata.

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Réaction de Minaku

L’initiateur de ce projet de loi, Aubin Minaku, s’est exprimé aujourd’hui en soulignant que les manifestations sont un droit mais c’est la brutalité des manifestants qui inquiète :

« Manifester est une expression même dans une démocratie. Cela ne gêne pas. En France, le même débat avait eu lieu, les magistrats avaient manifesté. Ils avaient ensuite saisi le conseil constitutionnel, mais il y a manifestation et manifestation. Lorsqu’on incendie les véhicules d’autrui, se rendre à ma résidence, traumatiser les enfants, ce n’est pas de la démocratie. Et je n’accepte jamais. Nous sommes dans une république. Nous avons déposé nos propositions de loi. Elles ont été déclarées recevables par la plénière souveraine de l’Assemblée nationale. Les travaux se font en commission. Ce n’est plus mon affaire. C’est une affaire républicaine. S’il faut qu’elles soient retirées, cela se fera en plénière. Ce qui se passe maintenant, ce n’est pas la République ».

Une police sereine

Le commissaire général adjoint de la Police Nationale congolaise, le général Philémon Patience Yav, a calmé les Kinois qui ont manifesté ce mercredi 24 juin devant le palais du peuple contre ces propositions de lois initiées par Aubin Minaku et Garry Sakata sur la réforme de la justice. Il a précisé qu’il n’y a pas eu des morts et que les éléments de la Police déployés sur le site ont rétabli l’ordre public : « la population s’est exprimée et ils ont parlé le même langage avec la Police et c’est fini. L’ordre a été perturbé et  les éléments de la Police déployés sur le site ont rétabli l’ordre public ».

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Notons que ces manifestations populaires se sont étendues à la ville de Lubumbashi, où la Poloice a encadré les manifestants.

Par ailleurs, on apprend que le Pprd se prononcera dans les heures à venir sur cette situation. Des sources concordantes, renseignent aussi que le parti de Joseph Kabila pourra annoncer sa désunion d’avec le Cash.

Wait and see !

Jacques Kalokola