La Cour militaire de Kinshasa/Gombe s’apprête à ouvrir, ce mercredi 24 juillet, le procès public opposant l’auditeur à Corneille Nangaa, leader politique de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), ainsi qu’à plusieurs de ses complices. Cette annonce suscite des réactions, notamment concernant sa base légale. Si certains considèrent cette démarche comme populiste et sans impact, le Ministre d’État de la Justice, Constant Mutamba, la juge logique.
« Je tiens à rappeler que dans l’affaire opposant l’auditeur supérieur au groupe de Corneille Nangaa, il s’agit d’une procédure par défaut pour certains et contradictoire pour d’autres. Il est essentiel de ne pas confondre ces deux notions. Notre Code de procédure pénale, en ses articles 80, prévoit explicitement cette procédure.
Elle équivaut en quelque sorte au procès par contumace dans le droit comparé. Il est donc crucial de ne pas mélanger ces concepts, car nos hauts magistrats, grands juristes et juges sont compétents et bien outillés. L’ouverture de ce grand procès public et historique n’est pas anodine », a déclaré Constant Mutamba lors d’une réunion préparatoire de presse le mardi 23 juillet.
Notons que Corneille Nangaa ne sera pas présent lors de ce procès. Le ministre assure cependant de l’indépendance des juges. « Nous ne souhaitons pas préjuger du fond au risque de porter atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire. Les juges sont indépendants, et il n’appartient pas au ministre de la Justice de s’immiscer dans les actions judiciaires. Toutefois, dans le cadre de la loi, j’ai le pouvoir d’injonction sur le parquet et les auditeurs. Nous avons travaillé pour accélérer l’instruction pré-juridictionnelle », a-t-il précisé, soulignant la compétence de la « Cour militaire de la Gombe » choisie pour ce procès.
Terrorisme, crimes de guerre et haute trahison
Selon le communiqué du ministère de la Justice et Garde des Sceaux, ce procès fait suite à des accusations graves, notamment des activités terroristes, des crimes de guerre et de haute trahison, qui auraient été commis dans la région Est de la République Démocratique du Congo. Cette zone est déchirée par des conflits armés et des violences récurrentes, conséquences de l’activisme des groupes armés locaux et étrangers.
Pour rappel, avant cette annonce, Eric Nkuba, proche de Corneille Nangaa, arrêté en janvier dernier à Dar-es-Salam, est toujours détenu à l’état-major des renseignements militaires. En avril, l’armée l’avait présenté. Lors de son audition au quartier général des renseignements militaires, Eric Nkuba aurait fait des aveux, citant l’ex-président de la République, Joseph Kabila, et John Numbi parmi les contacts militaires du mouvement. D’autres personnalités, telles que Claudel Lubaya et Patient Sayiba, ont également été mentionnées.
Contexte
Rappelons que l’ancien président de la CENI est apparu mi-décembre 2023 à Nairobi (Kenya) pour annoncer la création de l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23), dont il est le coordinateur politique. La branche armée de ce mouvement est dirigée par Sultani Makenga. L’objectif de l’AFC/M23 est de fédérer les mouvements opposés au régime de Kinshasa. La déclaration officielle de lancement à Nairobi s’intitulait : « Appel à l’Unité nationale pour la Stabilité de la République Démocratique du Congo ».
Depuis la sortie de ce mouvement, accusé de travailler pour le Rwanda via les rebelles du M23 selon les rapports d’experts des Nations-Unies, plusieurs jeunes de certains partis politiques ont décidé de rejoindre Corneille Nangaa dans la brousse. Ils ne jurent que par le départ de l’actuel régime, qu’ils accusent de mauvaise gestion, de tribalisme exacerbé et de mise en mal de la cohésion nationale. Lire aussi : L’Église catholique congolaise se distancie de l’intervention de Corneille Nangaa à Rutshuru – Infocongo