Désignation du Président de la CENI : Voici le rapport intégral de la CENCO et l’ECC

La Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) et l’Eglise du Christ au Congo (ECC) ont rendu public, ce jeudi 7 octobre 2021 au cours d’une conférence de presse, le rapport global du présidium des confessions religieuses sur les négociations visant la désignation du Président de la CENI. Les deux conférenciers ont annoncé, entre autres, que les preuves sur les griefs à charge du candidat Denis Kadima à la présidence de la CENI vont être remises à Christophe Mboso, Président de l’Assemblée nationale.

Au cours de cette conférence de presse, l’Abbé Léonard Nshole, Secrétaire général de la Cenco, a fait savoir que ces preuves devaient être présentées en primeur au chef de l’Etat lors de l’audience que le présidium des confessions religieuses avait sollicitée, mais celle-ci ne leur a pas été accordée.

« Comme les choses n’évoluaient pas sur terrain, le présidium a sollicité une audience auprès du chef de l’État conformément aux articles 68 et 69 de la Constitution pour partager avec lui leurs préoccupations et lui donner la primeur de certaines preuves délicates sur les griefs qui pèsent sur le candidat qui pose problème. Malheureusement, cette audience ne lui a pas été accordée », a-t-il révélé.

Au cours d’une interview sur la Voix de l’Amérique, le Président Tshisekedi avait déclaré avoir refusé d’accorder cette audience en expliquant qu’il s’agissait d’une affaire des confessions religieuses dans laquelle il ne pouvait pas prendre position.

Catholiques et Protestants demeurent, cependant, fermes dans leur position pour persister et signer que Denis Kadima demeure la pomme de discorde entre les deux camps des confessions religieuses. Tout en se disant ouverts à la poursuite des discussions, ils préviennent qu’ils ont les enregistrements attestant les menaces, intimidations et tentatives de corruption en faveur de ce candidat. « En attendant la mise en place du bureau de la CENI, pour éviter un quelconque retard dans le processus électoral, au nom du principe de continuité des Institutions, il serait indiqué que l’administration électorale en place s’occupe des préparatifs techniques en vue de faciliter le travail à la nouvelle équipe », peut-on encore lire dans le rapport.

Ci-dessous, le rapport global du présidium des confessions religieuses.

RAPPORT GLOBAL DU PRESIDIUM DE LA PLATEFORME DES CONFESSIONS RELIGIEUSES SUR LA DESIGNATION DES ANIMATEURS DE LA COMMISSION ELECTORALE NATIONALE INDEPENDANTE (CENI)

Préambule

La Plateforme des Confessions religieuses est une structure de consultation permanente, sans personnalité juridique, qui offre aux Confessions religieuses membres un cadre d’échanges et de collaboration afin d’adopter des orientations communes sur les différents sujets qui engagent la vie nationale (cfr l’Exposé des motifs et l’article 4 de la Charte).

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Elle est composée de huit membres, à savoir : l’Eglise Catholique, l’Eglise du Christ au Congo, l’Eglise de Jésus-Christ sur la terre par son Envoyé spécial Simon Kimbangu, la Communauté islamique au Congo, l’Eglise Orthodoxe, l’Eglise du Réveil du Congo, l’Union des Eglises Indépendantes du Congo et l’Armée du Salut.

Le Présidium est actuellement assuré par l’Eglise Catholique représentée par le Président de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) qui est le Président de la Plateforme et l’Eglise du Christ au Congo (ECC) représentée par le Président National de l’ECC qui est le Vice-Président de la Plateforme. Le Président, le Vice-Président le cas échéant, engage la Plateforme vis-à-vis des tiers sur la base de personnalité juridique de leurs Confessions respectives (cfr art. 18 de la Charte).

L’article 10 point 3 de la Loi portant organisation et fonctionnement de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) dispose que les Confessions religieuses ayant une personnalité juridique, une existence effective sur terrain et une expertise et une expérience avérée en matière électorale sont les seules concernées dans la désignation du Président de la CENI et d’un membre de la Plénière. C’est donc sur la base de cette disposition juridique que peut s’établir une majorité en cas de vote au sein de la Plateforme.

Après les échecs de trois précédents cycles électoraux, les Confessions religieuses membres de la Plateforme avaient pris l’engagement d’éviter les erreurs du passé. C’est dans cette perspective que la CENCO et l’ECC se sont engagées dans le présent processus.

Rencontres de la plateforme

Les huit Confessions religieuses se sont réunies plusieurs fois, soit en Plénière soit au niveau du secrétariat technique, pour traiter les dossiers des candidatures, définir les règles de procédures, évaluer le climat dans lequel ce travail est fait, etc.

Quatre rencontres déterminantes méritent d’être mentionnées, à savoir :

La plénière du 23 juillet 2021 au cours de laquelle les membres de la Plateforme ont pris connaissance de la Loi organique de la CENI ; fait l’état de lieux des candidatures enregistrées dans les secrétariats des huit Confessions religieuses ; défini les critères de traitement des candidatures au niveau du secrétariat technique et au niveau de la Plénière ; évalué l’atmosphère sécuritaire du travail en rapport avec le processus de désignation des animateurs de la CENI (Annexe 1). Un communiqué conjoint a été publié à cette occasion pour dénoncer les intimidations et les menaces dont certains membres de la Plateforme étaient victimes (Annexe 2).

La Plénière du 27 juillet 2021 au cours de laquelle les huit membres de la Plateforme ont examiné les dossiers des 4 candidatures retenues par le secrétariat technique qui s’est limité  au volet technique.  Les autres aspects devaient être traités en Plénière (Annexe3).  Il s’agit de :

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–         Cyrille Ebotoko présenté par la CENCO ;

–         Daniel Kawata Présenté par l’ECC ;

–         Denis Kadima présenté par l’Eglise Kimbanguiste ;

–         Roger Bimwala présenté par l’Armée du Salut.

Les travaux ont été suspendus pour divergence d’appréciation sur la dimension éthique du candidat Denis Kadima.

La Plénière du 30 juillet 2021 convoquée pour poursuivre les travaux suspendus le 27 juillet 2021 a été sanctionné par un rapport, dûment signé par les huit Confessions religieuses, faisant état d’un manque de consensus (cfr Annexe 4 et 5) et les conditions pour le vote conformément à l’article 17 de notre Charte n’étaient pas réunies.

Sur ces entrefaites, les six Confessions religieuses se sont réunies en dehors de notre cadre légal et à l’insu du Présidium pour désigner, en violation des articles 10 et 12 de la Loi sur la CENI ainsi que des articles 8, 16, 17 et 18 de notre Charte, deux membres à la CENI au nom de notre Plateforme.

Ayant constaté que toutes les tractations menées jusque-là au sein de la Plateforme ont échoué, le Président de l’Assemblée Nationale a accordé à notre Plateforme un ultime délai de 72 heures afin d’harmoniser les vues et de désigner le Président et un membre de la Plénière de la CENI. Une Plénière a été convoquée le 02/10/2021, malheureusement elle s’est soldée par une note de non-consensus suite à un conflit d’interprétations de la lettre du Président de l’Assemblée Nationale (Annexe 6).

Point de divergence

Le principal point de divergence est l’appréciation de la candidature de Monsieur Kadima Denis sur fond de l’article 12 alinéa 1 de la Loi sur la CENI et de l’article 8 de notre Charte.

En effet, Pour le Présidium, le choix de l’intéressé par les six Confessions religieuses a été entaché des irrégularités et des griefs importants, notamment : des menaces, pressions, intimidations, tentatives de corruptions. Ces éléments suffisent pour démontrer que ce candidat est porté par une famille politique, mettant ainsi en cause sa crédibilité et son indépendance. Ce qui n’a pas permis pas d’évoluer avec lui jusqu’au vote conformément à l’article 17 de la Charte. Par contre, les six Confessions religieuses relativisent les faits et les preuves.  Elles ne considèrent que la compétence technique du candidat ; et il convient pour eux de passer directement au vote.

Iii. Pistes de solution préconisées

Le Présidium a pris plusieurs contacts, à plusieurs niveaux dans le but de se retrouver autour d’une même table avec les six autres Confessions religieuses afin d’évoluer sur base d’autres candidats tout aussi valables que de rester figés sur ceux qui nous divisent.

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Malheureusement, en dépit des garanties de bonne foi que nous avions données, de ne pas présenter un quelconque candidat, nous avons été butés à un refus catégorique de la part des autres Confessions religieuses. Pour elles, c’est le candidat Denis Kadima ou rien (Annexe 7).

Entre temps, le Chef de l’Etat a rencontré séparément le Cardinal Fridolin Ambongo et le Révérend André Bokundoa. Ils ont échangé sur le sujet et une lueur d’espoir de solution était née de ces entretiens.

Comme les choses n’évoluaient pas sur le terrain, le Présidium a sollicité une audience auprès du Chef de l’Etat conformément aux articles 68 et 69 de la Constitution du Pays pour partager avec lui leurs préoccupations et lui donner la primeur de certaines preuves délicates sur les griefs qui pèsent sur le candidat qui pose problème. Malheureusement cette audience ne lui a pas été accordée.

Recommandations

En attendant la mise en place du bureau de la CENI, pour éviter un quelconque retard dans le processus électoral, au nom du principe de continuité des Institutions, il serait indiqué que l’administration électorale en place s’occupe des préparatifs techniques en vue de faciliter le travail à la nouvelle équipe.

Nous demandons aux honorables Députés nationaux sénateurs d’être attentifs et objectifs dans le traitement des dossiers des candidats à la CENI en vérifiant particulièrement la conformité aux articles 10 et 12 de la Loi portant organisation et fonctionnement de la CENI.

Nous invitons le Président de la République, Chef de l’Etat à jouer son rôle de garant du bon fonctionnement des Institutions et de la cohésion nationale afin d’assurer à la Nation des élections crédibles, inclusives et apaisées en 2023.

Au Peuple congolais, nous demandons d’exercer sa souveraineté en barrant légalement la route à toute tentative de prendre en otage le processus électoral par qui que ce soit.

Conclusion

L’engagement de la CENCO et de l’ECC dans le processus électoral en cours n’a qu’un seul objectif : contribuer à la consolidation de la démocratie par des élections libres, transparentes, inclusives et apaisées. Le bien-être du Peuple congolais en dépend.

La CENCO et l’ECC restent disposées à accompagner la Nation congolaise pour gagner le pari des bonnes élections en 2023. Elles utiliseront tous les moyens légaux, civiques, démocratiques et pastoraux à leurs dispositions pour atteindre cet objectif.

Kinshasa, le 06 octobre 2021