Papa Wemba

Voici 5 ans aujourd’hui depuis que Papa Wemba quittait la terre des hommes à Abidjan, en Côte d’Ivoire, en plein concert. Le roi de la rumba congolaise, et « Pape de la sape », icone de la musique africaine et congolaise moderne a profondément marqué la jeunesse africaine, qui lui a rendu hommage ce lundi 26 avril. Infocongo.net vous propose ce témoignage d’un grand journaliste, ancien du Soft international de Kinshasa, Léon Awazi Kharomon.

1996, Kinshasa vibre au rythme de « Wake-up! » L’album événement vient de signer à Paris les retrouvailles de deux géants de la Rumba congolaise, Papa Wemba et Koffi Olomide. C’est un chef-d’œuvre salué par la critique. Mais l’ambiance surchauffée de Kin by Night est trompeuse. Le Zaîre de Mobutu est plongé depuis 1990 dans une crise politique aiguë sur fond de gouvernements successifs, les uns aussi éphémères que les autres.

Idole des jeunes

La jeunesse est gagnée par la désillusion du processus démocratique sur fond de grave crise socio-économique et des lendemains qui ne chantent plus. C’est alors que Papa Wemba, installé à Paris depuis des années, rentre à Kinshasa pour la promotion de cet album. Pour lancer une petite association de jeunes à Bandal, un ami (à moi) a l’idée d’inviter l’artiste parrainer sa sortie officielle. Mais au fond il bluffe. Il ne croit pas du tout que Papa Wemba pourrait répondre à cette invitation.

Papa Wemba
Papa Wemba porté par des jeunes

L’essentiel pour lui, c’était de faire figurer le nom de ce grand artiste sur les cartons d’invitation pour attirer du monde et surtout la presse. A moindre frais !  Nous sommes sur avenue Kimpaka, à Bandal. Un dimanche ensoleillé de 1996.  Il est 16h20. La réunion est prévue pour 30. A peine quelques invités sont là. Même pas une dizaine. Alors qu’on s’affaire aux derniers réglages de la sono, une VW coccinelle jaune s’arrête net devant la parcelle. C’est la fameuse « Kiula », (la grenouille) reconnaissable par sa couleur jaune vif. Il n’y en avait pas deux à Kinshasa.

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Casquette blanche vissée sur la tête, assortie d’un polo bleu sur une bermuda blanche avec des basquets de même couleur, la star en personne descend de la voiture et s’approche de nous. A notre surprise, certes agréable, s’ajoute la panique de voir cette légende vivante, sans doute l’une de plus grandes stars qu’ait connu l’Afrique, honorer de sa présence cette toute petite réunion, d’un petit club inconnu. Il nous lança, tout sourire « Ba petits, bokanisaki nakoya te ! Me voici.  Bobebi na bino ».  La nouvelle de sa venue se répand alors comme une trainée de poudre dans le quartier. 20 minutes, plus tard, on refusait du monde.

Papa Wemba
Papa Wemba, le dernier concert à Abidjan

On pensait que l’artiste était là juste pour faire acte de présence après avoir pris quelques photos avec nous et procédé au lancement officiel de l’association. Que non !  Papa Wemba a participé à toute la cérémonie et vers 17h30, il demanda poliment à la presse de passer en mode off the record. On discuta avec lui à bâtons rompus durant deux heures, entre conseils de grand frère et anecdotes personnelles. Ses hauts et ses bas. Les leçons tirées de sa riche et tumultueuse carrière.

Comme un leitmotiv, il nous encouragea à ne jamais baisser les bras, quelques soient les circonstances.  Puis, après une petite pause, il dit : « Botika ngai sikoyo na solola na ba petits na ngai. Bozwa ngai lokola masta na bino. Bana Bandal, boyebi que nazalaka na colère na bino. Depuis na kenda mikili, bobotola Matonge mouvement !  Kin ekoma kaka Bandal. Oleka boye Bandal, Ozonga boye Bandal. Eza nin’ango !  Sik’oyo nazongi pona récupérer moto ya litonge ! » Et il éclata de son rire légendaire. Ça, c’était Ekumani ! Le Grand !

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Léon Kharomon