Sama Lukonde et Félix Tshisekedi

C’était arrivé en plein Conseil des ministres. Le Président de la République avait promis à ses ministres, plus précisément à ceux de la composante majoritaire FCC, qu’ils seraient reconduits dans le futur Gouvernement, du moins pour ceux d’entre-deux qui ramèneraient des élus nationaux de leur parti ou regroupement dans la nouvelle dynamique. 

Cette invitation n’était pas tombée dans les oreilles des sourds. Les concernés s’étaient mis au travail aussitôt, charriant dans les jours qui suivaient, des fournées entières des députés nationaux, qui flairaient de loin des gratifications financières inespérées. 

conseil des ministres
Conseil des ministres

Aux élus FCC que son bras séculier Jean-Marc Kabund escortait à tour de rôle à la Cité de l’Union africaine, le Président de la République donnait des gages à tour de bras, leur promettant postes et manne financière une fois son projet accompli. 

la pêche au gros…

Dans l’entourage du Chef de l’Etat lui-même, tout ce que le Cabinet présidentiel compte comme Conseillers stratégiques, s’était lancé dans la chasse aux députés et personnalités politiques proches de l’ex-majorité, pour étoffer les rangs de la nouvelle union sacrée voulue par le Chef de l’Etat. Eux aussi, se montraient prolixes en promesses de positionnement dans les futures institutions, certains même, poussant la témérité jusqu’à faire signer des accords gagnant-gagnant de rétrocommissions avec les futurs animateurs des institutions. Famille, hauts cadres du parti présidentiel, proches collaborateurs du Cabinet, tout le monde dans le cercle présidentiel, s’est mis à écumer les salons huppés de la ville, à la recherche des demandeurs des postes de pouvoir. 

Députés membres de l'Union sacrée
Les députés nationaux ayant souscrit à l’Union sacrée pour la nation à la cité de l’UA

Au final, la moisson a été abondante et inespérée. Dans sa large majorité, l’écosystème politique national a basculé corps et biens dans la nouvelle dynamique, et avec lui, les ex-amis-ennemis du Président de la République, le MLC Jean-Pierre Bemba Gombo, et son compère de Ensemble Moïse Katumbi, pour qui, le Chef de l’Etat est allé jusqu’à offrir une partie de son royaume, en contrepartie de leur adhésion.  

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Seulement voilà. Dès l’entame du processus de distribution des prébendes, les choses ont semblé aller de travers. Celui qui était censé prendre la tête de l’Assemblée nationale, n’a pas été celui qui a été choisi. A la place d’un allié politique à la Primature, le Président de la République a jeté son dévolu sur une jeune pousse presqu’inconnu au bataillon, et qui ne dispose d’aucun soubassement politique à l’Assemblée nationale.   

Félix Tshisekedi, victime de ses propres promesses ?

Et ce qui devait arriver, est effectivement arrivé. Tous les adhérents, venus des horizons divers et contrastés, et désormais inquiets sur le retour de leur investissement, campent désormais à la porte du Chef de l’Etat, pour réclamer chacun sa créance. Tout se passe comme dans un Mygoldrev politique. Avec chacun en main son billet de souscription, ils réclament le remboursement de leur mise, assortie d’intérêt de circonstance. Lire aussi: Gouvernement Sama Lukonde: entre ceux qui sont sûrs, ceux qui doutent, et ceux qui…rêvent debout

Félix Tshisekedi recevant Jean-Pierre Bemba et Moise Katumbi
Félix Tshisekedi, Moise Katumbi et Jean-Pierre Bemba à Kinshasa

Si le MLC de Bemba se garde encore de rester loin de la meute, Ensemble de Moïse Katumbi ne se gêne plus de réclamer à haute voix, des ministères de souveraineté à son nouveau partenaire d’affaires.  

Les ex-FCC, arpentent la ville de leur côté, avec des grandes exigences ministérielles, proportionnelles au statut de traîtres patentés. Les collaborateurs du Chef de l’Etat ne sont pas en reste, et cherchent désespérément à caser leurs propres pions. A tous ceux-là, se sont ajoutés depuis le week-end, les 72 cadres de l’UDPS qui veulent entrer dans les institutions, et les 10 ministres UDPS sortants, mais qui ne veulent pas sortir.   

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La promesse est une dette…

Aujourd’hui, la réalité est que le Président Félix Tshisekedi lui-même est plongé dans ce qu’on appelle un gigantesque pataquès. L’impression dominante, est qu’il a perdu le contrôle d’une situation qu’il a lui-même délibérément crée, et que toutes les manettes de commande commencent à lui échapper. 

En prenant comme Premier ministre, un jeune cadre sans épaisseur politique connu, il s’était choisi un collaborateur malléable pour les contreseings à venir, mais aussi un sujet fragile devant le Parlement. En plus, un Premier ministre, sans background consistant, mais appelé à diriger des ministres rompus dans les manœuvres et autres chausse-trappes politiques.