Le débat concernant la révision ou la modification de la Constitution de 2006 s’intensifie, suscitant encore plus de passion. Après les réactions des personnalités politiques et de la société civile, les universitaires ont enfin décidé de sortir du bois pour prendre position. Dans cette dynamique, l’Association Congolaise de Droit Constitutionnel (ACDC), un groupe de juristes et d’académiciens renommés, a rompu son silence le samedi 30 novembre.
Et le choix du lieu n’est pas des moins significatifs. En effet, c’est dans l’enceinte de la Faculté de droit de l’Université de Kinshasa, dans une atmosphère solennelle, que l’Association congolaise de droit constitutionnel s’est exprimée.
Langue de bois
L’ACDC, qui regroupe des personnalités éminentes comme Évariste Boshab, l’ancien président de l’Assemblée nationale, et Dieudonné Kaluba, l’ex-président de la Cour constitutionnelle, ne prend pas position sur le fond mais considère que le débat est légitime.

Le professeur Paul Gaspard Ngondankoy, signataire de la déclaration, souligne que « l’ACDC, riche de l’expérience de ses membres en matière d’enseignement et de pratique du droit constitutionnel, est bien informée de l’histoire constitutionnelle du pays, de ses textes et de son expérience vécue. Elle est particulièrement au fait de l’origine de la Constitution du 18 février 2006, de ses auteurs, de son contenu, de son pouvoir constituant et des procédures établies pour sa modification. »
Parmi les signataires, on compte d’anciens juges constitutionnels et l’actuel conseiller spécial du président Félix Tshisekedi en matière de sécurité, le professeur Jean-Louis Esambo. Et face aux critiques des opposants qui soutiennent que cette proximité fausse le débat, l’association rétorque que « ses membres seront uniquement guidés par l’intérêt du peuple congolais et ne formuleront que des opinions qu’ils estiment être vraies, justes et objectives, en toute conscience. »
Toutefois, dans une atmosphère chargée où l’opposition perçoit le projet de changement de la constitution comme une tentative du chef de l’État de se maintenir au pouvoir pour un troisième mandat, l’ACDC cherche à offrir une perspective qu’elle considère neutre et fondée sur la science.
Pas de choix pour Félix Tshisekedi : Changement de la constitution et référendum
Avec toutes les institutions acquises à sa cause, il semble peu probable que le projet de Félix Tshisekedi soit perçu comme neutre. Lors de son discours à Kalemie, dans la province du Tanganyika, le 26 novembre, où il participait à la conférence des gouverneurs, le président congolais a de nouveau mentionné la possibilité de changer la Constitution, envisageant un référendum.

Par ailleurs, c’est la troisième fois en peu plus d’un mois que le président a abordé ce thème lors d’un discours. Ses interventions ont toujours eu lieu hors de la capitale. À la fin d’octobre, à Kisangani dans la Tshopo, il a mentionné la possibilité d’une révision de la Constitution. À la mi-novembre, à Lubumbashi dans le Katanga, il a précisé que la réforme proposée ne visait pas à obtenir un troisième mandat, mais plutôt à améliorer la protection du pays, qu’il juge insuffisante dans la Constitution actuelle.
26 gouverneurs dans la poche…
A Kalemie, Félix Tshisekedi a obtenu un soutien de poids, celui des 26 gouverneurs des provinces. Fifi Masuka Saini, gouverneure du Lualaba, a déclaré : « S’agissant de la question des changements de la Constitution, le collectif de gouverneurs de provinces soutient à l’unanimité cette démarche, car cette Constitution comporte beaucoup de faiblesses et invite la population à soutenir ces changements légitimes et salvateurs. »

Il est à noter qu’en marge de ces discours, une commission est prévue pour début 2025 afin d’étudier les options envisageables : un changement ou une révision de la Constitution. Toutefois, les récentes déclarations du président et de membres de son parti, en particulier Augustin Kabuya, secrétaire général de l’UDPS, suggèrent que le pouvoir en place s’est déjà prononcé en faveur d’un texte qui serait proposé par référendum. Lire aussi : L’UDPS vire à 180° et veut changer radicalement la Constitution – Infocongo