Hommage à Papa Wemba : 4 ans déjà depuis que le “Nkuru” tombait sur le champ de bataille

Le dimanche 24 avril 2016 aux petites heures du matin tout Kinshasa se réveilla avec une nouvelle qui ressembla à un vrai poisson d’avril : « le roi est mort, vive le roi », telle fut formulée la phrase qui ne cessait de défiler sur la bande passante de Direk Tv, une façon pour le propriétaire de la dite chaîne de télévision, chroniqueur musical, concepteur du magazine Lingala facile, ancien député national puis idole de Papa Wemba, Zacharie Bababaswe, de rendre un dernier hommage au « Grand Mayas ».

 De Papa Wemba il dira qu’il n’y en aura pas deux :

 « Aza nkolo idéologie » comme pour dire qu’à lui seul il incarnait beaucoup de choses, d’où le titre de son dernier album « Maître d’école ».

 Toujours prêt à rendre service à ceux qui en demandaient, cette-fois ci c’est sur invitation du staff du groupe ivoirien Magic Système qu’il va se rendre à Abijan en côte d’Ivoire, où il participera au Festival des musiques urbaines d’Anoumabo, 9è édition(Femua9) contre l’avis ses médecins lui avaient interdit de monter sur scène.

Mais hélas, c’est là où le Mwalimu rendra l’âme après un malaise sur scène et dont les images  vues par les téléspectateurs en direct à la Télévision Ivoirienne feront le tour du monde.

Un coup dur pour la musique congolaise, en particulier, et  africaine en général.

Des obsèques dignes d’un roi

Le cercueil de Papa Wemba

Les congolais ont rendu des hommages mérités à Papa Wemba, comme jamais vu dans l’histoire de la musique congolaise, avec tous ses musiciens talentueux qui ont quitté la terre des hommes. Même dans le monde politique RD Congolais, on n’a pas connu pareil.

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 L’engouement exprimait certes le lien qui unissait la star à ses compatriotes. «  Le Mwalimu »  part en plein apogée alors que ses derniers opus n’obtenaient plus une place de choix dans le Hit-parade, occupé par la jeune génération.

La nation lui exprimait, ainsi, sa gratitude pour l’ensemble de son œuvre.

Père de la sape et roi de la rumba congolaise

Wemba , le sapeur, l’idole des jeunes

Les obsèques de « Nkunzi  lele » se transformèrent en une vraie foire car « M’zee » Papa Wemba incarnait un esprit.

Le « roi du village Molokai » reflétait, en quarante ans de carrière, l’image de toute une génération au Congo comme en Afrique, à Kinshasa comme à Brazzaville : « Kinshasa –Brazza ezali nse mboka moko », ne cessait-il de répéter dans ses chansons.

 De Bakala dia kuba, les mélomanes ne garderont pas seulement que la sape et cette rumba rock dont il détenait seul le secret : «  mvuata ku mvuata, yeba esika oko phaser », un petit rappel de temps en temps entre les ambianceurs, que c’est beau d’être tiré à deux épingles, mais il faut savoir où poser sa tête après la fête, surtout pas chez l’autre.

L’Etat Congolais décida de rendre  un vibrant hommage à l’auteur de l’opus « le voyageur »  et trois jours de deuil seront organisés sur toute l’étendue de la République, du 02 au 04 mai 2016.

Après trois jours, les obsèques nationales eurent lieu le 4 mai 2016 à la Cathédrale Notre Dame du Congo de Kinshasa et la star africaine sera inhumé au cimetière de la Nécropole Entre Ciel et Terre, à Mbenzale dans la commune de la N’sele, dans la périphérie Est de Kinshasa, en présence de plus d’un millier de personnes réunies.

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Il laissera ainsi, de son union officialisée le 9 août 2014 avec Marie-Rose Luzolo, dite « Amazone », six enfants dont Orphée Shungu, Telie Shungu A. et Kadi, sa fille bien-aimée.

Cependant, sur ordre de sa famille biologique, ses avocats viennent de répertorier à ce jour, 24 enfants que le défunt a reconnus de son vivant.

Un parcours élogieux

Papa Wemba, de son vrai nom Jules Shungu Wembadio, est né d’un père militaire et d’une mère vendeuse de cacahuètes, une famille modeste.

A 66 ans, Jules Presley a su livrer plusieurs concerts partout dans le monde, où il a su imposer la rumba congolaise par sa voix suave et perchée, surtout en Afrique, sa première conquête.

Le dernier concert à Abidjan, le 24 avril 2016

Dans sa gibecière l’on retrouve des tubes comme « Mea culpa », « Mère supérieure », « Ekoti ya Nzube », « Champs Elysées », « Mi amor », « Elongi ya Jésus », l »’Or », « Mobembo », « Show me the way », « Signorina », « Fumu tango », « Santa », etc.

Il collabora avec plusieurs artistes de son temps comme le vieux Wendo Kolossoy, le père de la musique congolaise moderne, Nyoka Longo dans Zaiko Langa Langa où il fit ses débuts en 1969, Tabu Ley, Ray Lema, Lokua Kanza, Koffi Olomidé, Salif Keita, Manou Dibangu, etc.

La collaboration la plus importante de sa carrière restera celle avec Meissonnier, le producteur de Fella Kuti ou de King Sunny Adé, Peter Gabriel, Stevie Wonder et Eric Clapton.

Sésame ouvre-toi, ceux qui vont mourir te saluent !

Vers la fin de sa carrière, Papa Wemba introduisit au début de ses chansons une phrase que les Kinois se rappellent aujourd’hui comme une manière de leur dire adieu : « sésame ouvre-toi, ceux qui vont mourir te saluent » et comme si cela ne suffisait pas, un jour à la télévision nationale «  Ekumani lâche » : «  Je me vois en train de planer ».

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Quelques temps après, il lancera l’album  Fula Ngenge où il posa en forme d’un oiseau volant.

Le monde gardera à jamais cette image car, quelques minutes avant qu’il s’effondre sur  scène, alors qu’il promettait aux mélomanes ivoiriens de les amener dans la capitale de la Rumba, il fit le même geste avant de planer à jamais, comme ses œuvres qui ne cessent de planer jusqu’à ce jour…

Jacques Kalokola