BBC: le journaliste congolais Jacques Matand licencié suite à une interview sur le Rwanda

Le journaliste de la BBC Jacques Matand a été licencié par sa hiérarchie le 7 février 2020, suite à une interview qu’il avait réalisée avec l’auteur franco-camerounais, Charles Onana, sur la relation France-Rwanda.

Le Journaliste congolais basé à Dakar, au Sénégal, a reçu par le biais de sa rédaction un courrier ayant pour notification « licenciement pour faute grave » suite à un entretien réalisé avec l’écrivain Charles Onana, auteur du livre « Rwanda, la vérité sur l’opération Turquoise ».

BBC plie sous la menace de Kagame

Le gouvernement rwandais qui n’a jamais caché son animosité contre l’auteur Charles Onana, car il est pointé du doigt, puisqu’il accuserait la rébellion du FPR comme source du double génocide contre les Hutus au Rwanda, a menacé le média Britannique, qui n’a rien trouvé de mieux que de licencier son journaliste, alors que la  diffusion de l’interview avait été autorisée par la rédactrice en chef.

De fait, dans sa lettre de licenciement, la BBC écrit ceci à Matand : « Le gouvernement rwandais a accusé la BBC d’avoir été injuste, biaisée et inexacte, et a indiqué qu’il se réservait le droit de prendre des sanctions à l’endroit de la BBC. Ladite plainte a soulevé des manquements potentiels de votre part, à savoir le non respect des « editorial guidelines »…par ailleurs, des exemples de passés de non-respect des « editorial guidelines » dans la région démontrent l’incapacité éventuelle de la BBC à exercer ses activités et diffuser ses programmes au Rwanda, qui aurait pour  conséquence un coût important pour la BBC et des implications sévères si le gouvernement rwandais décidait d’entamer une action en justice »

L’écrivain franco-camerounais Charles Onana

L’ouvrage qui met le gouvernement rwandais dans un état de fébrilité extrême

Quant à l’auteur, Charles Onana, outré, il a réagi à cette couardise de la BBC en ces termes : « On lui reproche de m’avoir donné la parole sur la BBC. C’est son crime ! Manifestement, cet ouvrage met le régime rwandais en état de fébrilité extrême. Après avoir exercé des pressions sur la chaîne française TF1 puis LCI et mécontents de mes analyses et travaux sur le Rwanda, les dirigeants rwandais se déchaînent désormais contre la BBC et particulièrement contre Jacques Matand dont ils ont demandé et obtenu la tête.

Ce n’est pas la première fois que Kigali exerce des pressions inqualifiables sur la BBC et ses journalistes, voulant que le silence continu de régner sur ses crimes au Rwanda et en République Démocratique du Congo.

Ce licenciement est une action délibérée visant à empêcher les journalistes du monde entier de parler librement de la tragédie de 1994 au Rwanda ainsi que du pillage et de la balkanisation du Congo dont Kigali est aujourd’hui et depuis deux décennies l’épicentre. Ce licenciement n’est ni plus ni moins qu’une incitation générale à l’autocensure des journalistes. Le monde entier doit célébrer un régime criminel et un État voyou au risque d’être mis à l’index, persécuté et harcelé.

C’est déjà ce que vivent les Rwandais et les Rwandaises depuis 25 ans chez eux. C’est bien ce que le journaliste Anjan Sundaram révélait dans son livre courageux intitulé  « Bad news ».

L’une des dictatures les plus hargneuses et les plus sanglantes d’Afrique tente de mettre tout le monde au pas et n’hésite pas à signer, pour se donner un visage humain, des contrats publicitaires avec des équipes de football d’Europe alors que le peuple rwandais croupit dans une prison à ciel ouvert et dans la misère. Son objectif est de faire taire et de faire peur.

Ainsi, beaucoup ont peur et se taisent. Même dans les pays occidentaux, certains tremblent encore de peur face à ce régime de terreur du Rwanda. Comment les rendre raisonnables et audacieux ?

Appel à la mobilisation générale de tous les journalistes congolais

J’en appelle donc à la mobilisation générale des journalistes de la République Démocratique du Congo, aux organisations professionnelles nationales et internationales d’Afrique, d’Europe et des Amériques de soutenir Jacques Matand pour cet acte injuste, qui contrevient au droit sénégalais comme le dénonce le syndicat des journalistes du Sénégal.

D’autres initiatives suivront afin que la soumission et la servilité des esprits vis-à-vis de la dictature rwandaise s’arrêtent sur les collines de Kigali. Rwanda, la vérité sur l’opération Turquoise fera son chemin et rien ne pourrait arrêter la marche inéluctable vers la vérité, celle que l’on tente d’étouffer par tous les moyens… »

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Signalons qu’à cette occasion, le syndicat des professionnels de l’information et de la communication social du Sénégal de BBC Dakar est contre la mesure de licencier sans préavis le journaliste Jacques Matand.

Regrets du ministre congolais des Droits humains

Pour le ministre congolais de droits humains, le journaliste ne peut être tenu responsable d’une quelque faute,  dès lors que l’interview réalisée par lui a été acceptée et diffusée par la BBC qui compte en son sein une hiérarchie censée filtrer les éléments recueillis par les journalistes avant leurs diffusions.

« …C’est regrettable et c’est un coup dur pour le travail que vous faites, celui de journaliste à travers le monde, récolter,  traiter et diffuser l’information. Comme vous le savez,  la BBC est un média planétaire,  et par ce fait, nous savons qu’elle doit respecter les droits fondamentaux des individus. Faire les choses de cette façon là,  c’est tout, sauf promouvoir les droits fondamentaux de personnes, ni le respect de droits reconnus à tout individu. Le licenciement de ce journaliste n’a respecté aucune règle en la matière, qu’il soit Congolais ou d’une autre nationalité… », a déclaré André Lite Asebea dans une entrevue avec nos confrères de Scooprdc.net