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Attaque contre la MONUSCO à Goma : les pyromanes sont à Kinshasa

Bahati Lukwebo à Goma

Bahati Lukwebo à Goma

« Le Gouvernement suit de près la situation à Goma consécutive à l’appel à manifester contre la MONUSCO. Il condamne fermement toute forme d’attaque contre le personnel et les installations des Nations-Unies. Les responsables seront poursuivis et sanctionnés ». Ce sont là mot pour mot, les propos du Gouvernement congolais traduits dans un tweet par son porte-parole Patrick Muyaya, en réaction aux incidents qui ont opposé lundi 25 juillet à Goma, des manifestants aux installations de la MONUSCO.

Jusque-là, rien de nouveau sous le soleil, peut-on dire, sauf qu’en attendant, la base logistique de la MONUSCO a été saccagée et des biens meubles et des équipements informatiques emportés par les hordes des manifestants qui ne veulent plus de la présence des forces onusiennes dans cette partie du pays, qui n’en peut plus de compter ses morts.

« Les responsables seront poursuivis et sanctionnés », a martelé le ministre Patrick  Muyaya, mais qui sont ces responsables, sont tentés de dire les observateurs, quelque peu perplexes, quand on sait que Goma, comme toute la province du Nord-Kivu, est sous état de siège et que cette manifestation, appelée par la fédération locale d’un parti politique bien identifié, l’UDPS, avait été interdite par les autorités militaires de la ville.

D’où une première question : quels responsables poursuivre et sanctionner ? Les auteurs intellectuels ? Les exécutants, dont un aurait été tué par balle selon des sources locales ? Ou alors, faudra-t-il le moment venu, chercher plus loin et plus haut des vrais coupables tapis au sein des Institutions à Kinshasa ?

Recapitulons pour donner un peu de perspective à tout ça. Pas plus tard que la semaine dernière, le Président du Sénat Modeste Bahati Lukwebo, une des plus hautes autorités du pays, débarque à l’aéroport de Goma en mission officielle, mais étonnamment vêtu de tous ses atours d’autorité morale de son parti l’AFDC, tout comme d’ailleurs toute la nombreuse délégation qui l’accompagne. Pour ceux qui ne l’ont peut-être pas compris, l’homme est à la recherche des preuves de sa popularité, de plus en plus contestée ces jours-ci même au sein de sa propre famille politique l’union sacrée. L’occasion est donc belle pour frapper un grand coup et confondre ainsi ses détracteurs à Kinshasa.

Et quel meilleur thème que celui de la MONUSCO dans une ville qui vit au jour le jour les nuisances sécuritaires ?

Voilà donc notre Bahati national qui se lance dans une véritable diatribe contre une MONUSCO qu’il considère à juste titre d’ailleurs comme inefficace, budgétivore et tout bonnement contemplative face à tous les drames qui frappent la contrée. Devant les applaudissements frénétiques d’un public d’avance conquis, le Speaker du Sénat va jusqu’à improviser un mini-référendum à mains levées, demandant à une assistance sous le charme, les pour et les contre pour le départ des troupes de la MONUSCO. Venant d’une si haute autorité du pays, l’option de chasser la MONUSCO était adoptée par une quasi-unanimité de la foule.

Ce que le Président du Sénat avait peut-être oublié, est que le maintien ou le départ de la MONUSCO ne dépend pas de la simple volonté de la foule, de Goma soit-elle. Pour cette dernière, la seule manière de manifester sa désapprobation et de se mettre en symbiose avec le sénateur Bahati, était de s’en prendre aux symboles de la mission onusienne. Ce qu’elle a fait à sa manière ce lundi 25 juillet en saccageant les bases de l’Onu.

A Kinshasa, des personnes de même acabit comme Bahati, dont certaines revêtues des mandats officiels, squattent depuis des semaines les plateaux des télévisions, lançant des fatwas contre la MONUSCO et exposant ses agents à la vindicte populaire.

Modeste Bahati Lukwebo, président du Sénat

Ce lundi, ce sont ces mêmes officiels qui dénoncent les violences de Goma et menacent de sévir contre leurs auteurs. Les autorités congolaises ont cet incroyable talent d’affubler des boucs-émissaires de leurs propres turpitudes. Ce sont elles qui ont signé l’accord de siège (Sofa) avec l’Onu pour l’installation de la MONUSCO, mais ce sont elles qui se défaussent sur la population maintenant qu’elles cherchent à s’en débarrasser. Ce sont encore elles qui faute de bonne gouvernance politique et sécuritaire, font perdurer l’instabilité et les violences dans le Grand-nord du pays, mais se cachent derrière les faiblesses et les manques supposés la Mission onusienne pour tenter de se disculper face à leur opinion nationale.

Un fait reste patent. Quand viendra le moment de désigner des coupables pour ce qui vient de se produire à Goma, nos Procureurs n’auront que l’embarras des choix.

 Lolo Luasu B.

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