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RDC : la crise de l’est se régionalise

La République démocratique du Congo a annoncé mercredi sans les nommer, la suspension de tous accords, protocoles d’accord et conventions signés avec le Rwanda.

Au cours d’une réunion du Conseil supérieur de la défense élargi, tenu jusque tard dans la nuit de mercredi à Kinshasa, la RDC a aussi enjoint le régime de Kigali à retirer immédiatement ses troupes de Bunagana et de ses environs.

Quatre jours après l’occupation de la localité frontalière de Bunagana par les rebelles du M23, accusés par Kinshasa d’être soutenus par le Rwanda, Kinshasa a enfin réagi officiellement à la situation sécuritaire qui prévaut dans la partie est de son territoire.

RDC : la crise de l’est se régionalise

Ce brusque réveil des autorités de Kinshasa, a étrangement coïncidé avec un communiqué de la Présidence kényane, pays qui assure également la présidence de la Communauté des États de l’Afrique de l’Est (EAC), déclarant les provinces de l’Ituri, du Nord et du Sud-Kivu, « zones sans armes », a l’exclusion des forces légales mandatées, et appelant au déploiement rapide des forces armées des États membres des pays de l’EAC, parties-prenantes aux accords de Nairobi.

Les Présidents Tshisekedi et Uhuru

On apprenait d’ailleurs jeudi, qu’une réunion des états-majors de ces forces est prévue déjà ce dimanche à Nairobi au Kenya, pour accélérer la mise en place de cette force régionale, chargée de combattre et d’éradiquer tous les groupes armés qui sévissent dans lesdites provinces et qui ne souscrivent pas au processus de Nairobi.

Le communiqué du Président kényan Uhuru Kenyata a précisé que les forces régionales à déployer en RDC travailleront en étroite collaboration avec les FARDC et en coordination avec la MONUSCO, mais cela n’empêche pas les observateurs à se poser des questions inquiétantes.

D’abord sur les objectifs exacts de la présence de ces troupes, sur le nombre d’Etats contributeurs des forces, ainsi que sur les raisons qui ont conduit l’EAC à élargir au Sud-Kivu, le champ de déploiement de ces troupes régionales.

En effet, la mutualisation des forces en cours entre la RDC et l’Ouganda en Ituri et au Nord-Kivu, est loin d’avoir donné les résultats attendus, et les analystes restent encore dubitatifs sur la nécessité d’étendre ce dispositif à d’autres provinces et dans un format plus élargi des pays pourvoyeurs en troupes. De même, le communiqué kényan est resté muet sur les pays de provenance de ces troupes, quand on sait que le Rwanda, accusé par Kinshasa d’être derrière le M23, est un des 7 membres de l’EAC.

Mise sous-tutelle des FARDC?

A Kinshasa, certains analystes n’hésitent pas à penser que ce déploiement ressemble à une sorte de mise sous-tutelle de l’Armée congolaise par les pays voisins, qui pourrait à la longue, dépouiller les Forces armées congolaises de toute liberté et de toute décision souveraine dans la conduite des opérations militaires dans les provinces concernées. D’autres estiment pour leur part, que l’adjonction de la province du Sud-Kivu, est une manière subtile pour les pays de la région, de se poser en garants contre la montée en puissance des sentiments xénophobes au sein de la population congolaise, dans des provinces qui comptent des nombreuses populations à ascendance nilotique.

Certains faits isolés de ces derniers jours donnent en effet de la consistance à cette thèse, comme les débordements de certains manifestants contre des intérêts tutsi hier mercredi à Goma, ou encore, l’interpellation musclée d’un officier des FARDC le même jour à Kisangani, pour délit de faciès.

Les autorités de Kinshasa ne s’y sont d’ailleurs pas trompées, avec l’instruction donnée hier à la réunion du Conseil supérieur de la défense, au ministre de l’Intérieur et Sécurité ainsi qu’à l’Inspection générale de la Police, d’empêcher toute velléité populaire de stigmatisation de certaines communautés nationale ou internationale. Lire aussi: Nord-Kivu : à Goma une manifestation contre le Rwanda dégénère en pillages

   Lolo Luasu B.

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