L’éruption du volcan Nyiragongo a été comme un révélateur grandeur nature du gouffre organisationnel en matière de gouvernance interne et de prévention des catastrophes entre les deux pays limitrophes que sont le Rwanda et la Rdc.
En 48 heures chrono, entre samedi 22 et dimanche 23 mai, le monde entier a pu vivre en live, la thèse que défendait l’homme d’Etat et essayiste français Alain Peyreffite dans son livre culte « Le Mal français », entre le laisser-aller et l’irresponsabilité collective des pays de civilisation latines et catholique comme sa France natale, et l’ordre et le sens de responsabilité des civilisations protestantes et anglo-saxonnes.
Regardons de plus près ce qui s’est passé ces dernières 48 heures à Goma et ses environs.
Cacophonie, pagaille
Dès l’annonce de l’éruption, alors que la panique et la pagaille s’emparaient des habitants de Goma, les autorités rwandaises ont directement réagi avec des mesures d’urgence : fermeture momentanée de la frontière entre les deux pays, renforcement des forces de sécurité aux frontières, et déclenchement des mesures de contingentement prévus dans les cas de catastrophes majeures. Résultat : les autorités rwandaises ont pu accueillir dans l’ordre et la discipline, quelques 5.000 gomatratiens qui fuyaient les coulées de laves du Nyiragongo, rien que dans la petite ville de Rubavu, et cela, en pleine nuit. Lire aussi: Goma: Le volcan Nyiragongo est entré en éruption
Dimanche matin, ces réfugiés congolais d’un jour, ont reçu la visite de réconfort d’un ministre rwandais, qui en plus, a mis des bus à la disposition de ceux des congolais qui se sentaient en mesure de regagner leurs domiciles de l’autre côté de la frontière. Au-delà de toutes les bisbilles politiques et diplomatiques qui émaillent les relations entre les deux pays, il nous faut reconnaitre que le Gouvernement rwandais a été à la hauteur des circonstances, en répondant avec correction et professionnalisme à une exigence humanitaire ponctuelle. Lire aussi: Goma : la population afflue vers Sake et Masisi
Nyiragongo ou Nyamulagira?
Tournons maintenant le regard sur ce qui s’est passé sur la terre congolaise de Goma, sous l’emprise de l’état d’urgence. Deux heures après le déclenchement de l’éruption, la population livrée à elle-même, n’avait même pas des précisions sur l’identité du volcan en colère, les uns, comme l’humanitaire Ocha, parlant du Nyamulagira, d’autres, pariant sur le Nyiragongo, plus connu pour ce genre de mauvais tour.
Mieux, les autorités locales et provinciales étaient toutes aux abonnés absents, de sorte que quelques activistes de la société civile et des familles mêmes, ont pris seuls les décisions notamment celles concernant les évacuations, ainsi que des itinéraires de ces évacuations.
La RTNC aux abonnés absents
Alors que les chaînes de télévision rwandaises diffusaient en boucle les coulées de laves, la chaîne nationale congolais repassait en boucle des chansons à la gloire de l’union sacrée et de son promoteur, pendant que dans la périphérie de Goma, on comptait déjà les premiers corps calcinés par les laves, et que des maisons, des commerces et des écoles étaient rayés de la carte.
Sur la route de Sake, autre lieu de refuge pour les évacués de Goma, la route, longue de seulement de 20 km, était tellement engorgée de véhicules, motos et piétons, que de nombreux fuyards n’y sont arrivés qu’aux premières heures du dimanche.
Aucune autorité n’avait pensé à y déployer des forces de sécurité pour réguler la circulation. Le plus étonnant dans tout cela, est que dans une province en état de siège, avec plus de 20.000 hommes de troupes, on ait enregistré des cas des pillages des maisons, des commerces et des boutiques désertés par leurs propriétaires.
Et comme pour couronner cette sorte de pagaille nationale généralisée, jusque dimanche après-midi, le Gouvernement central en était toujours à l’étape de l’annonce « des mesures concrètes », sans un début de commencement…